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RAZIKA ADNANI* : « EN FAISANT RÉFÉRENCE À L’ISLAM, LE SYSTÈME CONSTITUTIONNEL A ÉCHOUÉ AU MAROC, EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE »

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Dans cet entretien conduit par l’éditeur Amar Ingrachen, la philosophe et islamologue franco-algérienne explique pour les lecteurs d’ADNmed comment le malékisme qui « est également un salafisme » a provoqué les blocages constitutionnels actuels dans les trois pays d’Afrique du Nord.

Bien que les trois pays d’Afrique du nord (Maroc, Algérie, Tunisie) appartiennent à une même aire géopolitique et civilisationnelle, l’islam n’y occupe pas visiblement la même place. Quelle appréciation faites-vous de la présence de l’Islam dans ces pays ?

La présence de l’islam dans ces trois pays est une réalité sociale, politique et historique qui est visible notamment dans le port du voile par les femmes et le nombre important de mosquées. La religion occupe également une place importante dans les expressions de langage, y compris au plus haut sommet de l’État. Cependant, l’histoire de la Tunisie contemporaine dans sa relation avec la religion se distingue de celles ses deux voisins, l’Algérie et le Maroc. Cette distinction remonte au début du XIXe siècle lorsque la Tunisie a entamé des réformes importantes qui ont concerné le domaine de l’organisation de l’État, de la société et également celui de l’islam, ce que ses deux voisins n’ont pas connu ou timidement connu. 

La Tunisie, tout comme l’Algérie, était sous l’occupation ottomane. Sous le règne de Bey Ahmed 1er, (de 1837 à 1855), la Tunisie accède à son autonomie politique par rapport à Istanbul, quand l’Algérie est tombée sous l’occupation française.  L’accès de la Tunisie à l’autonomie a permis au Bey d’entamer des réformes pour moderniser son pays qu’on peut expliquer par l’influence des réformes de Mohamed Ali Pacha en Égypte, par les Tanzimat en Turquie et par l’influence de Napoléon III. Ainsi, la Tunisie a été le premier pays dans le monde musulman à se doter d’une constitution en 1861 bien qu’elle ait été suspendue en 1864. Cette constitution a accordé l’égalité à tous les citoyens tunisiens sans distinction liée à la religion en mettant ainsi fin à la dhimitude. La Tunisie a été la première dans tout le monde musulman à abolir l’esclavage en 1864 et la première au Maghreb à avoir en 1900 une école pour jeunes filles. 

Toutes ces réformes sociales et politiques ont été accompagnées d’une remise en cause de certaines règles de la religion. Beaucoup de livres ont été écrits et qui avaient comme objectif de réformer la religion tel Notre femme dans la législation islamique et la société, de Tahar Haddadpublié en 1930. Bourguiba a donc promulgué le code du statut personnel en puisant dans le grand combat pour les Lumières de ses prédécesseurs comme celui de Mustapha Pacha dans le domaine de la modernisation de l’État. 

Au XIXe siècle, le Maroc était dans une autre situation. Il avait comme chef d’État un monarque qui détenait le pouvoir absolu et se présentait comme le commandeur des croyants. Il avait le monopole de la religion et de la politique, ce qui rendait difficile toute réforme. Le projet de constitution de 1908, qui n’a pas été ratifié par le roi, était très imprégné des traditions. Il affirme le devoir d’obéissance à l’imam chérifien (le roi) et le respect à sa personne qu’il présente comme « l’héritier de la baraka » (article 7). Le Maroc ne s’est réellement doté d’une constitution qu’en 1962 sans mentionner les Droits de l’Homme. 

Cette constitution a accordé l’égalité à tous les citoyens tunisiens sans distinction liée à la religion en mettant ainsi fin à la dhimitude. La Tunisie a été la première dans tout le monde musulman à abolir l’esclavage en 1864 et la première au Maghreb à avoir en 1900 une école pour jeunes filles. 

L’Algérie qui était sous l’occupation française de 1830 à 1962 n’a pas connu les mêmes réformes que la Tunisie. Toute ouverture ou modernisation de la société se heurtait, d’une part, aux colons qui voulaient maintenir la population en situation d’infériorité et, d’autre part, à une grande partie de la population, sous l’influence des conservateurs qui voyaient ces réformes comme une assimilation aux colonisateurs et donc une trahison. Cette situation a provoqué une crispation quant à l’idée de la modernisation et un attachement aux traditions et à la religion. Le mouvement réformiste algérien était de tendance islahiste autrement dit salafiste dont le nom le plus connu est celui de Ben Badis (1889-1940) fondateur de l’association des « Ulama algérien ». Pour Ben Badis, l’émancipation de la femme avait comme seul objectif que celle-ci puisse élever « un homme capable de prendre son envol et non qu’elle-même s’envole ». On constate la très grande différence qui existe entre lui et Tahar Haddad vis-à-vis de la question de l’émancipation de la femme. 

Cependant, le phénomène du retour en arrière caractérisant les sociétés musulmanes, depuis les premiers siècles de l’islam, n’a pas épargné la Tunisie. Il se faisait sentir déjà au milieu du XXe siècle d’autant plus que la Tunisie était dans le collimateur des religieux de tout le monde musulman. Ainsi, elle n’a pas pu empêcher les conservateurs d’introduire l’islam comme référence dans la constitution de 1959 et a même précisé dans le préambule son attachement aux enseignements de l’islam. De ce fait, la Tunisie a connu les mêmes problèmes et contradictions juridiques et politiques liés à l’introduction de la religion dans le domaine politique. Après la révolution de 2011, la montée du traditionalisme et du conservatisme a fait que ces mouvements s’expriment davantage et réduisent plus considérablement l’écart entre elle et ses deux voisins dans le domaine religieux. 

2-La Tunisie a enregistré une avance considérable sous Bourguiba, notamment en matière de « statut personnel ».  Le Maroc et l’Algérie restent en retard dans ce sens, les lois régissant le mariage, le divorce, l’héritage, etc. étant inspirées de la charia dans ces deux pays. Toutefois on constate que dans ces trois cas, il y a une instabilité qui fait que rien n’est acquis définitivement. Comment explique-vous cette instabilité ? Pourquoi ces trois pays peinent à trancher des questions aussi vitales ?

En effet, la Tunisie a une avance considérable dans le domaine du droit de la famille en comparaison avec ses deux voisins. Ce qui a permis à Bourguiba de promulguer le Code du statut personnel, c’est tout le travail des penseurs, des militants et des réformateurs et en ce sens Tahar Haddad (1898-1935) a été exceptionnel. Il s’est opposé à l’interprétation littérale et a appelé à abolir toutes les règles instituant les inégalités entre les femmes et les hommes. « Je pense que la religion musulmane dans son esprit ne fait pas d’objection à la réalisation de l’égalité dans tous les domaines, une fois disparues les causes de la tutelle masculine ».

Cependant, Bourguiba n’a pas pu abolir toutes les inégalités dont étaient victimes les femmes. Il n’a pas pu reconnaître l’égalité entre les femmes et les hommes en matière d’héritage. Il n’a pas pu mettre fin au système social fondé sur la domination masculine.  Les articles concernant le mariage et qui précisent les personnes avec qui il est prohibé de se marier ne s’adressent qu’aux hommes en leur disant quelles sont les femmes avec qui ils ne peuvent pas se marier, mais ne dit rien aux femmes. Il ne leur dit pas quels sont les hommes avec qui elles ne peuvent pas se marier. Ce qui montre l’influence de la charia et du langage coranique, précisément les versets 21, 22, 23, 24 et 25 de la sourate 4, Les Femmes. 

La moudawana marocaine n’a réalisé une amélioration qu’en 2004, mais elle demeure toujours loin de l’égalité revendiquée par les femmes et certains hommes. À noter que la constitution marocaine n’a reconnu l’égalité femmes-hommes qu’en 2011. Avant 2011, l’égalité des sexes était circonscrite dans le domaine politique. 

Quant au Code de la famille algérien, il est très rétrograde et très humiliant pour les femmes et pour l’être humain malgré les quelques timides réformes de 2005 alors que la constitution stipule l’égalité de tous les citoyens et citoyennes. Espérons que le législateur algérien, étant donné que le pouvoir législatif est dominé par les conservateurs, ne supprimera pas le principe de l’égalité de la constitution lors des probables prochaines révisions comme il l’a fait en 2020 pour le principe de la liberté de conscience et de croyance et les droits humains. La valorisation du passé au détriment du présent et du futur dans le discours religieux et la prédominance de ce dernier font que les pays musulmans, à chaque pas effectué vers l’avant, sont ramenés vers le passé, ce qui les empêche d’évoluer ou rend leur évolution très lente et instable. 

Le fait que la religion s’introduit dans la politique alors qu’elle ne reconnaît pas le principe de l’égalité explique pourquoi ces trois pays n’ont pas pu en finir avec les inégalités dont sont victimes les femmes devant la loi de leur pays. Cependant, croire que la religion est la seule cause ou la réelle cause est une erreur. Au milieu du XXe siècle, lorsque les lois concernant la famille ont été promulguées, ces pays n’ont pas hésité à abandonner d’autres recommandations coraniques sans que cela ne leur pose problème comme celles relatives à l’esclavage et au châtiment de la main coupée. Les musulmans ont également abrogé le verset 43 de la sourate 4, Les Femmes qui permet la consommation du vin ainsi que le verset 173 de la sourate 2, La vache, qui permet la consommation du porc en cas de nécessité et beaucoup d’autres. Cependant, les choses deviennent compliquées et l’argument de la religion est brandi dès lors qu’il s’agit d’amender les discriminations à l’égard des femmes.  La raison en est que lorsqu’il s’agit des femmes, il s’agit en réalité des hommes. Chaque droit accordé aux femmes est un privilège enlevé aux hommes, ce que ces derniers n’acceptent pas et ils utilisent la religion pour pérenniser leur domination sur les femmes. 

Les femmes représentent la moitié de la population et les hommes l’autre moitié. Logiquement, il n’y a pas de raison qu’une moitié puisse imposer constamment sa loi à l’autre moitié au moment où les lois sont votées. Cependant, les représentants du peuple sont majoritairement des hommes et beaucoup de femmes soutiennent des lois discriminatoires à leur égard au nom de la religion. Elles pensent qu’en se soumettant à la religion ; elles se soumettent à Dieu. Elles sacrifient leur dignité, leur liberté et leur droit dans l’espoir d’avoir une récompense dans l’au-delà. 

Indirectement certes, mais l’Algérie, le Maroc et la Tunisie reconnaissent dans leur constitution la liberté de conscience mais les minorités religieuses y sont régulièrement opprimées et les athées sont simplement exclus de l’espace public. Pourquoi ce décalage criant entre les textes et les pratiques ?

La constitution marocaine n’a jamais reconnu la liberté de conscience et n’a affirmé son respect des Droits de l’Homme qu’en 1992.  Quant à la Tunisie, elle ne l’a reconnue qu’en 2014 pour la nier en même temps étant donné que dans le même article (article 6) elle précise que l’État protège la religion. Cependant, dans son préambule, la constitution tunisienne, et cela depuis 1959, affirme son respect des Droits de l’Homme dont fait partie la liberté de conscience

Le seul pays à avoir garanti dans sa constitution la liberté de conscience (de croyance dans la version arabe de la constitution) est l’Algérie et cela en 1976. Elle affirme son adhésion aux Droits de l’Homme depuis 1963, article 11, sans que cette liberté de conscience n’ait jamais été respectée par la loi algérienne comme c’est le cas pour le principe de l’égalité. 

La constitution est la loi fondamentale d’un pays, c’est-à-dire qu’elle constitue, comme le dit Ferdinand Lassalle (1825-1864), le fondement de toutes les autres lois. Ainsi ses lois, parce qu’elles sont fondamentales, doivent se prolonger dans les autres lois ordinaires qui doivent êtres cohérentes avec elles, ce qui n’est pas le cas dans les trois pays. Comme je l’ai dit, dans la dernière révision de la constitution algérienne, promulguée le 30 décembre 2020, les islamistes ont réussi à supprimer la liberté de conscience ainsi que les Droits de l’Homme (du chapitre droits et libertés), déclarés depuis 1989 « patrimoine commun de tous les Algériens et Algériennes ».  Ces principes ont été remplacés par une vague et subjective expression : « droits fondamentaux ». Seul le préambule souligne encore l’attachement de l’Algérie au droits humains. 

Le fait que ces trois pays fassent référence à l’islam dans leur constitution, alors qu’il est également un système juridique, explique ce décalage. Car déclarer l’islam comme religion de l’État revient à dire que la constitution n’est pas la loi fondamentale ou que les pays ont deux lois fondamentales faisant que le législateur légifère tantôt selon la constitution, tantôt selon l’islam, un peu à sa guise, ce qui est une preuve de l’échec du système constitutionnel dans ces trois pays. `

Car déclarer l’islam comme religion de l’État revient à dire que la constitution n’est pas la loi fondamentale…

Les penseurs qui ont pensé la constitution, comme le philosophe David Hume, précisent que l’objectif de la constitution est la garantie des libertés individuelles. De ce fait, introduire l’islam comme une autre référence juridique au sein de la constitution alors qu’il ne reconnaît pas les libertés individuelles s’oppose au sens même de la constitution ; une constitution qui ne protège pas les libertés des individus n’est pas une constitution. Si certains versets coraniques affirment la liberté de conscience, ce ne sont pas ceux qui sont retenus par les religieux. L’islam est la religion de l’État a été également une porte ouverte par laquelle le discours religieux n’a cessé de s’introduire dans le domaine politique et juridique menaçant davantage les minorités religieuses et non religieuses ainsi que les acquis des femmes.  

La judéité des sociétés nord-africaine et historiquement et sociologiquement établie. Mais si elle est reconnue officiellement au Maroc, plus ou moins acceptée en Tunisie, elle demeure un tabou inviolable en Algérie. Avez-vous des explications à ce déni ?

L’antisémitisme est un phénomène social qui est très répandu en Algérie. Il correspond au degré de religiosité de la société étant donné que dans le discours religieux, les Juifs sont présentés comme un peuple maudit. Et c’est la representaion qu’il transmet à la population en s’appuyant sur des versets tel que le verset 155 de la sourate 4. Les Femmes : « Nous les avons punis parce qu’ils ont rompu leur alliance, qu’ils n’ont pas cru aux signes de Dieu, parce qu’ils ont tué injustement les prophètes ».  Il s’appuie également sur des hadiths. 

Parmi les plus cités.   «Le Jour du Jugement ne viendra pas avant que les musulmans ne combattent les juifs, quand les juifs se cacheront derrière les rochers et les arbres. Les rochers et les arbres diront : ‘Ô musulman, ô serviteur de Dieu, il y a un juif derrière moi, viens le tuer !’ Seul l’arbre du gharqad ne le dira pas, parce que c’est en effet un arbre appartenant aux juifs » Ainsi, plus la pratique de l’islam est marquée par l’intégrisme et le fondamentalisme, plus les individus expriment une aversion à l’égard des Juifs.  

L’autre élément qui explique ce phénomène est d’ordre historique et concerne la période de la colonisation.  La France a accordé aux Juifs la nationalité française et non aux musulmans.  À partir de là, les Juifs ont été assimilés aux colons. Pire, ils ont été considérés comme des traîtres qui n’avaient plus de place dans la société algérienne. Ce facteur politique est celui qui distingue davantage l’Algérie dans sa relation avec la communauté juive. Le fait que les Juifs algériens aient presque tous quitté l’Algérie en 1962 a accentué ce phénomène.  Les Algériens ont perdu le contact social, culturel et humain avec les Juifs alors qu’au Maroc et en Tunisie, les deux communautés arrivent encore à cohabiter. Le contact avec l’autre permet de réaliser qu’il est finalement comme nous, qu’il a les mêmes sentiments, les mêmes envies et les mêmes craintes. On réalise qu’on est tous des êtres humains, ce qui rapproche les individus.  

Le judaïsme existait en Algérie avant l’arrivée de l’islam tout comme au Maroc et en Tunisie.  Les Berbères étaient païens, juifs et chrétiens. Avec l’arrivée de l’islam, certaines tribus juives se sont islamisées. D’autres ont vu une partie de leurs membres changer de religion, donc s’islamiser, quand les autres sont restés attachés à leur judaïté, ce qui explique qu’aujourd’hui on peut retrouver le même nom de famille chez les Juifs et chez les Musulmans. Rappelons qu’en Tunisie en 1861, lors de l’adoption de la première constitution, l’article 88 déclare que « tous les sujets du royaume, à quelque religion qu’ils appartiennent, sont égaux devant la loi… ».  Cela a contribué à changer le regard que les Tunisiens portaient sur les Juifs et explique la différence dans la relation qu’ils entretiennent avec les Juifs.

…en Tunisie en 1861, lors de l’adoption de la première constitution, l’article 88 déclare que « tous les sujets du royaume, à quelque religion qu’ils appartiennent, sont égaux devant la loi… ».  Cela a contribué à changer le regard que les Tunisiens portaient sur les Juifs et explique la différence dans la relation qu’ils entretiennent avec les Juifs.

5-L’Afrique du Nord n’a que très peu profité de l’héritage culturel, philosophique, littéraire et artistique de l’Andalousie, y compris du temps où cette région rayonnait sur le monde. Pourquoi selon vous ? Le dogmatisme religieux des dynasties qui ont régné en Afrique du Nord, notamment les Almohades et les Almoravides, y sont-ils pour quelque chose ?

C’est tout le monde musulman qui n’a pas su profiter de l’héritage de la civilisation musulmane. Les philosophes et leur pensée font partie des oubliés de l’histoire pour les musulmans alors qu’ils ont soulevé les questions concernant la société, l’humain, l’univers, Dieu, la politique, le bien, le bonheur. Cela aurait été un fondement intellectuel et culturel important pour approfondir ces questionnements qui s’imposent à nous aujourd’hui encore. 

Avec la prédominance de l’esprit salafiste, littéraliste et conservateur, la majorité des musulmans, y compris les jeunes, croient détenir la vérité qui se résume au savoir des anciens, les salafs.  Quant à la meilleure des sociétés, c’est celle du prophète. Avec une telle position épistémologique, car elle concerne la question de la connaissance et de la vérité, il n’y a plus de place pour l’esprit critique et le questionnement.  Le fondamentalisme islamique totalitariste dépouille la pensée de tout ce qui n’est pas en accord avec ses idées et l’appauvrit ainsi profondément. Comme je le dis dans mes écrits, tous les problèmes du monde musulman sont d’ordre épistémologique. 

Quant aux dynasties Almoravides (1042-1147) et Almohades (1125 – 1212), elles étaient davantage une conséquence qu’une cause d’un rigorisme très répandu dans cette partie du monde musulman, faisant prévaloir la révélation au détriment de la pensée et de l’intelligence. Rigorisme dû à l’islam malékite introduit très tôt au Maghreb alors qu’il a pris une position négative sur la pensée et la raison.

L’arrivée des dynasties rigoristes comme les Almoravides et les Almohades n’a pas aidé à améliorer la situation. Ibn Toumert, le fondateur de la dynastie almohade, incarne le puritanisme et l’ascèse et le calife almohade Abu Yucuf Yaqub Al- Mansur a fait interdire la philosophie, les études et les livres et a proscrit la vente du vin et les métiers de chanteur et de musicien.  Cela a certainement eu beaucoup d’influence sur les populations du Nord de l’Afrique et sur leur relation à la littérature, la philosophie, l’art et la science. 

Cette histoire ne doit pas exonérer les populations d’aujourd’hui de leur responsabilité vis-à-vis de leur condition et de la situation de leur pays. Elles ne doivent pas considérer cela comme une fatalité historique. Le présent ne doit pas s’inscrire uniquement dans la continuité du passé. Parfois, il faut savoir rompre avec le passé pour affronter le présent et construire l’avenir et c’est ce qui s’impose dans cette situation. 

Dans votre livre Islam : quel problème ? Les défis de la réforme, vous critiquez sévèrement le malékisme, courant religieux dominant en Afrique du Nord et qui est présenté officiellement comme modéré et ouvert. Vous dites que, en plus d’être ethniquement centré sur les Arabes, le malékisme est tout aussi incompatible avec la modernité que le wahabisme. Quelles sont les caractéristiques du malékisme et pourquoi il faut en sortir ?

Le malékisme est la doctrine la plus répandue au Maghreb comme je viens de le dire. 

Elle est la deuxième école juridique sunnite fondée par Malek ibn Anas (708-796) en réaction à l’école hanafite ou l’école de l’opinion fondée par Abou Hanifa (720-767), qui avait réclamé une position dans laquelle la pensée était reconnue comme active. 

Pour Malek, le juriste ne devait pas recourir à sa propre opinion donc à sa pensée, mais aux textes coraniques, ensuite aux hadiths du prophète, ensuite aux traditions des compagnons du prophète, ensuite aux traditions des gens de Médine. Pour lui, la pensée n’intervient que lorsque toutes ces sources ont été consultées sans succès. Le but de Malek était que les musulmans ne s’éloignent jamais dans leur organisation sociale des textes coraniques et également du modèle de société construit par le prophète à Médine. Il a ainsi bâti une doctrine anti-renouveau et anti-pensée dans laquelle on retrouve tous les critères du fondamentalisme islamique. La revendication d’une religion originelle, celle qui était appliquée à Médine au VIIe siècle, qu’il considère comme la plus authentique. L’importance de la dimension juridique étant donné qu’il revendique l’application des recommandations des textes juridiques de l’islam fait que le malékisme est un islamisme ou un islam politique. La valorisation de l’islam des premiers musulmans et de celui de Médine au VIIe siècle fait que le malékisme est également un salafisme. Cela nous permet de comprendre la pratique rigoriste de l’islam au Maghreb, donc chez les Berbères. Ils ont voulu, par excès de zèle, faire plus que ce qu’on leur demandait dans le domaine de la religion au point où beaucoup ne voulaient pas se contenter d’être musulmans, ils ont voulu également être arabes. 

Aujourd’hui, le Maghreb se cherche, il veut se construire et garantir son avenir parmi les nations. Ce n’est certainement pas en s’appuyant sur des doctrines qui valorisent le passé et minimise la valeur de l’intelligence, de la créativité et de l’humain qu’il pourra le faire ni sur celles qui le poussent à se sous-estimer. Pour construire, un peuple a besoin de regarder vers l’avenir et d’être fier. Cette fierté positive lui donne confiance en lui-même. Comme je le dis dans mon ouvrage La nécessaire réconciliation, je ne crois pas à la supériorité intellectuelle d’un peuple sur un autre. En revanche, je crois à la force de la volonté qui lui permet de révéler ses qualités.  Elle est le tremplin qui le propulse vers le haut. Les populations du Maghreb ont une belle histoire qui peut leur procurer cette fierté. Malheureusement, depuis des siècles, elle a été mise aux oubliettes pour la simple raison qu’elle a eu lieu avant l’islam. 

Vous vous élevez aussi contre le soufisme qui est, selon vous, en déphasage total avec la raison moderne. Le soufisme ne peut-il donc pas être une alternative au wahhabisme et aux salafisme islamiste comme le suggèrent certains penseurs musulmans ?

Ce qui explique cette fascination pour le soufisme est le fait qu’il se veut spirituel alors que la charia est celle qui pose problème aujourd’hui non seulement en Occident où elle est l’une des questions les plus épineuses, mais aussi dans les pays à majorité musulmane. L’autre raison est due au fait que le soufisme se veut une doctrine d’amour et de tolérance. Avec ces deux critères, le soufisme s’oppose au wahhabisme. Voilà pourquoi beaucoup voient en lui en effet une solution contre l’islamisme et le fondamentalisme. 

Cependant, plusieurs éléments m’ont permis de déduire le contraire. Le soufisme ne rejette pas totalement la charia et cela depuis le compromis qu’il a conclu avec les juristes vers le XIIIe siècle.  Les maîtres soufis rappellent l’intérêt que leur doctrine donne aux recommandations de l’islam. Certains, comme Ruzbehan et al-Ghazali, étaient des maîtres dans la jurisprudence. Le Cheikh Khaled Bentounes, le père spirituel de la confrérie soufie al Alawiya, écrit à ce sujet : « L’islam, comme toute religion, a un aspect extérieur, fait de lois, de doctrines, de préceptes, etc. Mais, les soufis ne se suffisent pas de cela. » Quant au principe de l’amour dans le soufisme, il est certainement très intéressant. Cependant, Nacer Hamed Abou Zaid met en garde contre la sublimation des personnes.  Dans son livre Ainsi parlait ibn Arabi, il souligne que l’icône de l’amour soufi, ibn Arabi, a tenu dans des circonstances particulières des propos qui vont à l’encontre du principe de l’amour qu’il évoquait dans ses poèmes. 

Toutefois, la plus grande raison qui me permet d’affirmer que le soufisme ne peut pas être la solution aux problèmes que pose l’islam aujourd’hui est sa théorie épistémologique qui s’inscrit dans la même école qui a pris position contre la pensée en tant que faculté de réflexion et la raison. Pour lui, la vérité est accessible par l’inspiration et le dévoilement spirituel. Autrement dit, l’être humain, et précisément le saint, reçoit la vérité qu’il se contente de déguster et de transmettre telle quelle à ses adeptes. Il ne doit pas chercher à la démontrer par le raisonnement, ce qui nous ramène à la même position vis-à-vis du savoir que chez les conservateurs, les salafistes et les littéralistes qui considèrent que le savoir est  révélé et transmis et non construit comme je l’explique dans mon ouvrage Islam : quel problème ? Les défis de la réforme. Le soufisme porte sa part de responsabilité dans l’effondrement de la pensée créatrice et rationnelle qui a été la cause du déclin de la civilisation musulmane. Il ne peut pas en être le remède en même temps. 

Dans vos livres comme dans vos articles, vous êtes sur deux fronts. D’un coté, vous prônez la réforme de l’islam pour l’expurger des archaïsmes qui le coupent des temps présents et de leurs exigences ; d’un autre coté, vous plaidez directement pour la laïcité, notamment en Algérie, au Maroc et en Tunisie. À quelle vision répond cette double démarche ?

La laïcité, c’est la séparation de la religion et de la politique afin de permettre à la religion d’être une religion et à la politique d’être une politique et éviter que les chefs d’État deviennent des imams et pensent aux intérêt de Dieu avant ceux du peuple et que les religieux se mêlent des affaires de la cité. Pour que cette séparation puisse se réaliser dans une société musulmane comme c’est le cas des pays du Maghreb, il faut une décision politique forte qui œuvre dans ce sens comme c’était le cas en France lors de l’instauration de la loi de 1905. 

Cependant, cette séparation de la religion et de la politique sera toujours menacée si elle n’est pas accompagnée d’une réforme de l’islam qui propose aux musulmans un islam nouveau adapté à leur époque et séparé de la dimension juridique et politique. Sans cette réforme, la laïcité sera toujours fragile et menacée. Prenons la Turquie comme exemple. Elle est laïque depuis 1924, bien que ce soit une laïcité où l’État contrôle la religion pour empêcher que les religieux s’opposent à l’État ; l’arrivée d’un président islamiste au pouvoir, Erdogan, fait que cette laïcité est menacée. Car, l’islam n’a pas fait sa réforme pour s’adapter à la laïcité voulue par Atatürk, mais aussi la version conservatrice dominante de l’islam ne sépare pas la dimension spirituelle de la dimension juridique et surtout les islamistes sont très actifs.  

Cependant, cette séparation de la religion et de la politique sera toujours menacée si elle n’est pas accompagnée d’une réforme de l’islam qui propose aux musulmans un islam nouveau adapté à leur époque et séparé de la dimension juridique et politique.

Logiquement, la séparation de la politique de la religion conduit à la réforme de la religion qui s’adapte à la laïcité, c’est le cas de l’Église en France. Cependant, en islam, la logique ne suffit pas. La prédominance du discours conservateur qui est convaincu qu’il a le droit d’intervenir sur tout le territoire de la Oumma oblige qu’il y ait une volonté qui œuvre pour cette réforme afin que les individus vivent leur religion sans culpabilité et sans qu’ils ne s’opposent aux lois de leur pays. 

Ainsi, j’appelle à une réforme de l’islam que je plaide pour la laïcité en même temps, car l’objectif de la  réforme de l’islam n’est pas de permettre à la charia de continuer à administrer la société, mais que les croyants puissent vivre leur religion sans se trouver en conflit avec les règles de celle-ci qui sont issues de la raison. C’est pour cela que cette réforme doit en premier lieu faire de l’islam une religion et non une politique.

On constate ces derniers temps l’émergence d’un discours musulman assez libéral, fondé sur une lecture critique de l’islam et de la tradition musulmane : Mahmoud Taha, Mohammed Shahrour, Hichem Djait, Youssef Seddik, Adonis, Ahmed Assid, Said Djabelkhir, Hamid Zanaz, Nourredine Boukrouh, etc. On a même vu le prince héritier des Al Saud, Mohamed Ben Selmane, plaider en faveur d’une lecture libérale du Coran et de l’abrogation du Hadith.  Pensez-vous que cet éveil est porteur d’un changement ou est-ce un simple phénomène de mode qui va passer sans que la révolution tant attendue n’advienne ?

Il y a également beaucoup de femmes penseurs qui travaillent dans le domaine l’islam comme Amel Grami, Nawel Sadaoui, Nadjla ben Salama et d’autres. 

Les moyens de communication modernes et notamment les réseaux sociaux ont certainement permis à beaucoup de personnes de tenir un discours au sujet de l’islam plus osé est plus décontracté, ce qui n’était pas le cas dans le passé où seuls les imams avaient la possibilité de s’adresser au public. Ils avaient les mosquées à leur disposition qu’ils utilisaient cinq fois par jour. Quant aux médias, ils appartenaient aux États qui ne diffusaient que le discours conservateur pensant ainsi rassurer les peuples dans leurs convictions. Comme c’était le cas de Algérie dans les années 1980 où la seule chaine de télévision était mise à la disposition des prédicateurs égyptiens de la confrérie des frères musulmans, Mohamed al-Ghazali et Youssef al-Qaradaoui, et des conservateurs tel que l’Algérien Ahmed Aroua (1926-1992). Les nouveaux moyens de communication sont en train de transformer en profondeur les sociétés musulmanes malgré les apparences et la vigilance des conservateurs. 

Cependant, tous ceux qui s’expriment au sujet de l’islam ne sont pas dans une démarche de réforme de cette religion. Beaucoup sont contre l’idée de la réforme et pensent que l’islam n’est pas réformable. Personnellement, je pense que la réforme est nécessaire et même une question de responsabilité. Quelle que soit l’évolution de la société, un changement au sein de l’islam est indispensable afin de l’adapter à l’époque actuelle et aux valeurs de l’humanisme, et cela pour que ceux qui ont besoin de spiritualité et de croire en Dieu ne soient pas la proie des conservateurs. Quels que soient les moyens de communication, d’une part, les fondamentalistes eux aussi les utilisent, d’autre part, l’histoire des sociétés musulmanes montre comment toute évolution finit sous la coupe des conservateurs qui tirent ces sociétés vers le passé pour les ramener en arrière. L’histoire du monde musulman est faite de soubresauts d’évolution, de ripostes des conservateurs et de retours en arrière.

Pour que le changement ait réellement lieu, tout dépend de la nature de la réforme proposée et la manière de procéder, mais aussi de la politique. Toute réforme nécessite une action politique efficace qui croit à la nécessité de réformer, accompagne le travail des réformateurs et lui permet de se concrétiser dans la société et notamment dans les textes de lois. 

* Razika Adnani est membre du Conseil d’Orientation de la Fondation de l’Islam de France, membre du conseil scientifique du Centre Civique d’Étude du Fait Religieux (CCEFR), membre du groupe d’analyse de JFC Conseil et Présidente Fondatrice des Journées Internationales de Philosophie d’Alger.

Razika Adnani est professeur de philosophie jusqu’en 2005 date à laquelle elle quitte l’enseignement pour se consacrer à la recherche et à l’écriture. À partir de 2016 , elle collabore avec le Ministère de la Justice (France), direction de la Protection judiciaire de la Jeunesse (DPJJ), puis avec le Ministère de l’Intérieur, dans le cadre de la formation des professionnels qui s’occupent des jeunes radicalisés.

De 2014 à 2016, elle donne des conférences à l’Université Populaire de Caen de Michel Onfray sur le thème : Penser l’islam

De 2015 à 2017, elle contribue aux travaux du séminaire Laïcité et fondamentalismes organisé par le Collège des Bernardins.

De 2017 à 2018, elle rejoint l’Université Permanente de Nantes pour donner un ensemble de conférences sur la pensée musulmane.

En 2020, elle donne au au Centre civique d’étude du fait religieux (CCEFR) un ensemble de conférences sur le thème : La réforme de l’islam du 19e siècle à nos jours.

Engagée pour une réforme de l’islam, tournée vers l’avenir, qui est aujourd’hui nécessaire plus que jamais pour permettre aux musulmans de s’intégrer dans l’époque actuelle et pour une meilleure cohabitation avec autrui, Razika Adnani collabore à de nombreuses émissions et journaux (Marianne, Le Figaro, Le Monde, La Croix…).

Razika Adnani a forgé plusieurs concepts dont la moralisation de la violence dans La nécessaire réconciliation et la réforme tournée vers l’avenir dans Islam : Quel problème ? Les défis de la réforme

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Maroc. Généralisation de l’anglais dans les collèges à la rentrée prochaine

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La généralisation progressive de l’anglais dans les collèges sera lancée dès la rentrée prochaine. C’est ce que l’on peut lire dans la circulaire adressée par Chafik Benmoussa, ministre de l’Éducation nationale, du Préscolaire et des Sports et aux directeurs des établissements de l’enseignement collégial ainsi qu’aux enseignants d’anglais. 

Approche progressive

Ce programme qui a vocation à être appliqué de façon progressive doit permettre d’atteindre pour la rentrée 2023-2024 un taux de couverture de 10 % pour parvenir à un taux de 50 % pendant l’année scolaire 2024-2025.

À la rentrée, 2025-2026, l’anglais, en tant que langue étrangère, sera généralisé à tous les paliers du collège qui bénéficieront, selon la circulaire ministérielle, de deux heures d’enseignement de cette langue par semaine et pour chaque niveau, ce qui représente une charge de 24 heures par semaine pour l’enseignant, lequel aura à s’occuper de 12 classes. Cette projection est accompagnée d’autres décisions concernant aussi bien les matériaux pédagogiques et techniques que le suivi et l’évaluation des procédés mis en œuvre. 

Eneffet, un kit pédagogique et une méthodologue de formation et de suivi des enseignants, notamment dans le domaine de la pédagogique de l’enseignement des langues, est prévu dès le début de ce chantier.

Par ailleurs, des bibliothèques seront ouvertes dans les collèges où des outils numériques seront fournis aux élèves.

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Intempéries en Algérie. Deux morts et plusieurs dégâts matériels enregistrés

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Intempéries en Algérie. Deux morts et plusieurs dégâts matériels enregistrés

Les pluies torrentielles qui se sont abattues sur le nord de l’Algérie dans la nuit de mercredi à jeudi ont viré au drame à Guelma ( extrême est du pays) et Tipaza ( 40 kilomètres à l’ouest de la capitale). En effet, à Guelma, une fillette âgée de 12 ans, a été emportée par les eaux. Son corps, a été repêché ce jeudi après-midi par les agents de la Protection civile locale. À Tipaza, plus précisément dans la commune de Khemisti, un enfant de 10 ans, a succombé à ses blessures après qu’un mur de soutènement s’est effondré sur lui.  Un bilan qui vient contredire la communication du ministre l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’Aménagement du territoire, Brahim Merad, dont les propos répercutés par l’agence officielle aps, annonçaient ce jeudi, « qu’aucune perte humaine n’est à déplorer suite à la montée des eaux de pluie après les dernières intempéries enregistrées dans certaines wilayas du pays », indiquant simplement que certains dégâts causés par ces intempéries ont été limités.

Les populations précaires affectées

Les services de la Protection civile de la wilaya de Guelma, fortement touchée par les intempéries de la nuit dernière, ont annoncé le sauvetage de 27 migrants subsahariens qui étaient encerclés par les eaux. Il s’agit de neuf femmes, treize enfants, dont des nourrissons et cinq hommes.

Dans d’autres région du pays, notamment Constantine, Alger, et M’sila, les pluies diluviennes de la nuit dernière, ont causé d’énormes dégâts matériels. En effet, à Bousmaïl, une commune située à la sortie est de la wilaya de Tipaza ( 40 kilomètres à l’Ouest d’Alger), une dizaine de familles ayant construit illicitement leurs baraques sur lit d’un oued, ont protesté jeudi devant siège de la wilaya pour demander une prise en charge. Ces familles sinistrées, affirment que leurs maisons de fortune ont été emportées par les eaux. Selon eux, seule la Protection civile a répondu à leur appel. « C’est vers 2h du matin que nous avons été surpris par la montée des eaux. Toutes les habitations ont été inondées. Nous avons fait appel aux autorités. Nous nous sommes déplacés à la wilaya, mais personne ne s’est soucié de notre sort », affirme un septuagénaire dont le dossier de demande de logement remonte, selon lui, à 1987.

Colère latente

Toujours dans le registre des manifestations, les citoyens de la commune d’Ali Mendjli, banlieue de la ville de Constantine ( 300 kilomètres à l’est de la capitale) ont fermé durant la même journée la route reliant Constantine à Mila, à l’aide de pneus enflammés et autres blocs de pierres dans le but d’interpeller les pouvoirs publics quant à leur situation liée aux inondations. « Nos maisons ont été submergées par les eaux, on est à la rue et personne ne se soucie de nous ! C’est inadmissible », déclare un père de famille qui s’est dit à la rue depuis jeudi matin. « Nous sommes des sans domiciles fixes (SDF) à compter de ce jour ! » fulimera-t-il. 

A 200 kilomètres plus au nord, certaines communes de Bejaïa, notamment Sidi Aïch, Aokas, Melbou et même quelques quartiers du chef-lieu de la wilaya ont été durement affectés par les récentes chutes de pluie qu’a connues la région. A Melbou, plusieurs endroits de la ville ont été inondés, donnant à cette municipalité des allures de piscine à ciel ouvert.

Pour ce qui est des éboulements, les services de la Protection civile, ont enregistré cet après-midi, trois affaissements de terrain au niveau de la wilaya de Bouira ( 100 km à l’est d’Alger ). Ainsi, à Saharidj, Selloum et Djebhaia, plusieurs blocs de pierres se sont effondrés sur la chaussée, sans provoquer de dégâts. L’alimentation en courant électrique a également été fortement perturbée, notamment dans les wilayas d’Alger, Tipaza et Blida, où des centaines de foyers se sont retrouvés dans le noir.  Selon les services de Sonelgaz ( entreprise publique de gaz et électricité), le poste source de Boufarik ( Blida), appartenant à la filiale GRTE (Société Algérienne de Gestion du Réseau de Transport de l’électricité) desservant toute la région, a été inondé par les fortes pluies.

Ces intempéries qui mettent un terme à une longue et préoccupante période de sécheresse sont bienvenues pour l’agriculture. Elles sont cependant révélatrices de la dégradation générale des réseaux d’évacuation. Les autorités locales privées d’une part importante des ressources fiscales drainées par l’administration centrale peinent à entretenir les voieries de façon efficace ; une situation qui provoque chaque saison des inondations, y compris dans la capitale. 

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Passeurs de migrants : deux Algériens arrêtés en Espagne

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La Guardia civile a annoncé ce dimanche avoir arrêté dans la région de Murcie ( sud-est de l’Espagne )  deux Algériens âgés de 27 et 33 ans. Les deux présumés trafiquants sont soupçonnés de meurtre, de traite d’êtres humains et d’appartenance à une organisation criminelle. Codée sous le vocable «  protection », l’enquête a commencé en décembre dernier à la suite du signalement de deux cadavres flottant sur l’eau par un couple naviguant sur voilier dans la région de Carthagène.

Selon le communiqué de la Guardia civile, les investigations ont conduit aux deux hommes accusés par ailleurs d’être responsables de la mort de plusieurs autres migrants qui  quittaient l’Algérie essentiellement à partir des côtes oranaises après avoir déboursé entre 6 et 7000 euros.

Selon les autorités régionales espagnoles, 73% des migrants irréguliers qui arrivent sur les rivages ibériques sont des Algériens. Une tendance à l’exil qui touche essentiellement des jeunes et qui vient d’être vérifiée en Algérie même par une vidéo qui a fait le tour de la toile. On y voit des foules massées devant le site dédié à l’étude des dossiers de l’immigration de l’ambassade du Canada dans l’espoir d’obtenir un visa.

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Attentat de Djerba : la Tunisie parle de tourisme, la France de terrorisme

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Tunisie. Fusillade à la synagogue de Djerba

Depuis la fusillade mardi soir à proximité de la synagogue de la Ghriba, à Djerba (Est de la Tunisie), dont le bilan provisoire est de cinq morts et huit blessés, les autorités tunisiennes se veulent rassurantes. Premier et seul ministre dépêché sur place dès le lendemain matin, le ministre du Tourisme Moez Belhassine y a présidé une cellule de crise avant d’évoquer une situation touristique sous contrôle. 

Plus tard dans la journée, le président tunisien Kaïs Saïed a qualifié cette attaque d' »opération criminelle », et l’affaire a été déférée devant le tribunal de première instance de Médenine où une enquête criminelle préliminaire a été ouverte. « Ils ont cherché à perturber la saison touristique, à fragiliser l’État », a-t-il affirmé lors d’une réunion du conseil de sécurité en présence des ministres de son gouvernement et de responsables des forces armées. Mais le chef de l’État ne s’est pas déplacé sur le lieu de l’attaque et a préféré ne pas modifier son agenda. Il s’est ainsi entretenu avec la ministre des Affaires étrangères belge, Hadja Lahbib, et son homologue portugais, João Gomes Cravinho, en mission d’évaluation en Tunisie pour l’Union européenne, principalement au sujet de la situation économique et du prêt du Fonds monétaire international (FMI) qui n’a toujours pas été validé. 

Le ministère de l’Intérieur qui s’est limité à un communiqué le soir de l’attaque, donnant quelques informations sur le déroulé des faits, ainsi qu’un bilan provisoire, avait annulé la conférence de presse prévue mercredi soir, alors que plusieurs zones d’ombre entourent les circonstances de la fusillade. Le ministre Kamel Fekih s’est finalement exprimé jeudi après-midi sans apporter plus d’informations sur les antécédents de l’assaillant – qui est membre de la garde nationale – ni expliqué ses motivations. Il a globalement salué le travail des forces de sécurité près de la synagogue qui auraient, selon lui, évité un carnage et agi très rapidement. S’il a affirmé que l’assaillant abattu à quelques centaines de mètres de la Ghriba, avait pour intention d’accéder à ce lieu de pèlerinage et de tuer le plus grand nombre de personnes, il a cependant évoqué une opération criminelle plutôt que terroriste. 

L’agent en question a d’abord abattu son collègue de la garde maritime au port d’Aghir, une localité de l’île de Djerba à une vingtaine de kilomètres de la Ghriba, qu’il a délesté de son arme automatique et de ses munitions. Il s’est ensuite dirigé vers le lieu de culte à bord d’un quad appartenant également à la garde nationale. Arrivé à proximité de la synagogue où se trouvaient plusieurs unités des forces de l’ordre chargées de la sécurité des lieux en plus de quelques pèlerins et passants, il a ouvert le feu et abattu trois agents, un citoyen juif tuniso-israélien de Djerba Aviel Haddad et son cousin franco-tunisien Benjamin Haddad. Du fait de la nationalité française de l’une des victimes, le Parquet antiterroriste français a ouvert une enquête pour « assassinat en relation avec une entreprise terroriste ». Plus tôt, le président français Emmanuel Macron a assuré vouloir lutter « sans relâche », « contre la haine antisémite », alors que les autorités tunisiennes refusent toujours de qualifier l’attaque. 

Plusieurs organisateurs du pèlerinage de la Ghriba ont en outre critiqué la présence policière jugée insuffisante et réduite par rapport aux années précédentes, indiquant qu’il n’y avait que très peu d’agents postés près de la synagogue. Selon eux, quelques minutes avant l’attaque, des dizaines de bus étaient sortis du parking où la fusillade s’est produite, échappant, à quelques instants près, à un bilan qui aurait pu être bien plus lourd. Sans informations sur les motivations de l’assaillant, rien n’indique pour le moment s’il a agi seul ou s’il a été soutenu par une organisation. Aucun élément sur une éventuelle radicalisation religieuse n’a été présenté. 

Pour rappel, le 11 avril 2002, un camion-citerne de gaz naturel bourré d’explosifs sautait à 9h35 devant la même synagogue tuant 19 personnes et faisant 30 blessés. Présenté dans un premier temps comme un accident, l’enquête révéla rapidement qu’il s’agissait d’un attentat kamikaze. La fusillade du 9 mai 2023 est cependant le premier attentat à proximité de la Ghriba perpétré pendant le pèlerinage annuel, à l’occasion de la fête de Lag Ba’omer, après Pessah, depuis 1985.

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Tunisie. Fusillade à la synagogue de Djerba

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Tunisie. Fusillade à la synagogue de Djerba

Au moins quatre personnes ont été tuées après une fusillade ce mardi soir à proximité de la synagogue de la Ghriba de l’île de Djerba ( Est de la Tunisie) où avait afflué des centaines de pèlerins.

Selon le ministère de l’intérieur  tunisien, deux agents de sécurité et deux fidèles ont été tués et quatre autres personnes ont été blessées par un gendarme. Ce dernier a d’abord tué un de ses collègues qu’il a délesté de ses munitions pour ensuite ouvrir le feu sur les agents chargé de la sécurité des lieux et la foule avant d’être abattu.

De son côté, le ministère des affaires étrangères a précisé que « les victimes parmi les visiteurs sont de nationalité tunisienne ( 30 ans ) et française 42 ans ».

La synagogue de Djerba qui est la plus ancienne d’Afrique est un haut lieu du culte judaique en Afrique du nord.

Pour rappel le 11 avril 2020, un camion-citerne de gaz naturel bourré d’explosifs sautait à 9 h 35 devant la même synagogue tuant 19 personnes et faisant 30 blessés. Présenté dans un premier temps comme un accident, l’enquête révéla rapidement qu’il s’agissait d’un attentat kamikaze.

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Algérie. Cas de tuberculose au sein des camps de réfugiés subsahariens

Cacophonie institutionnelle

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Algérie. La tuberculose flambe dans les camps de migrants subsahariens

Décidément, la communication transparente n’a jamais été le fort des autorités algériennes.

Soit, elles se murent dans un silence assourdissant, soit elles se produisent une information spontanée qui a vite fait devirer à la cacophonie après des remontrances de la tutelle quand un sujet sensible est porté sur la place publique.

L’affaire de l’apparition de cas de tuberculose au niveau de certains camps de réfugiés subsahariens, ne déroge pas à la règle. C’est une énième preuve de cette gestion consternante. En effet et comme indiqué par adn-med.com le 06/05/2023, les services de la wilaya d’Alger, avaient officiellement fait état, vendredi dernier, de foyers de tuberculose dans les camps de Blida et Alger. Des structures de la santé nous apprenaient même que des cas contaminants refusaient les soins et les traitements proposés. 72h plus tard, soit ce lundi, ce sont les services du ministère de la Santé et de la population, qui viennent apporter un démenti catégorique aux services sanitaires de la wilaya d’Alger. « Nos services ( ministère de la santé, NDLR), affirment et assurent qu’aucun cas de tuberculose n’a été répertorié », est-il précisé. « La wilaya Alger n’a détecté aucun cas de tuberculose parmi les migrants ».

Le ministère de la santé, rappelle dans ce sens, que les derniers cas enregistrés remontent à 2022, où selon la même source, cinq cas avérés ont été diagnostiqués à Meftah et Bouinan, deux localités relevant de la wilaya de Blida ( 50 kilomètres à l’ouest d’Alger). Cette cacophonie en matière de communication institutionnelle n’est pas la première du genre, loin s’en faut. Durant la pandémie du Covid-19, les services du ministère de la Santé, se sont tristement illustrés par des communiqués hasardeux, à la limite de l’amateurisme d’Etat, tentant vainement de minimiser l’ampleur des infections. En 2018, les mêmes services, lors de l’épidémie de choléra qui avait touché la régions de Bouira et Tipaza, avaient également tenté de démentir les autorités sanitaires locales. Il aura fallu l’intervention des services de l’Institut Pasteur d’Alger ( IPA), pour confirmer les faits et amener le ministère de la Santé à opter pour le mutisme. 

R.B

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Un jeune homme mortellement touché par un tir de carabine à Biskra ( vidéo)

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Un jeune homme mortellement touché par un tir de carabine à Biskra ( vidéo)

Un drame effroyable s’est produit ce samedi matin dans la wilaya de Biskra ( 460 kilomètres au sud-est d’Alger). Un jeune homme âgé de 28 ans, répondant aux initiales A.S, a été mortellement touché par une balle de fusil de chasse, au cours de d’une fête de mariage.

Ainsi, et comme le montre la vidéo amateur tournée au moment des faits, une personne était en train de charger les cartouches de sa carabine pour tirer en l’air. Le premier coup, a été tiré sans conséquences mais le second a mortellement touché au visage la victime.

Suite à ce drame, les services de sécurité ont immédiatement ouvert une information judiciaire et placé le porteur de fusil en détention provisoire, indiquent des sources locales. 

Aux cours de cérémonies festives, ces genres de manipulations, aux cours desquels il n’est pas rare d’enregistrer des accidents dramatiques, participent d’une pratique sociale qui valorise celui qui exhibe l’arme la plus puissante et qui tirer le plus de coups de feu, y compris comme c’est le cas ici à balles réelles. 

R.B

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Maroc : le drame des abandons scolaires

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Maroc : le drame des abandons scolaires

Le bilan rendu public jeudi 4 mai, par le ministère de l’Éducation nationale, du préscolaire et des sports donne un aperçu global satisfaisant pour ce qui est du préscolaire qui connait une progression appréciable. Les indicateurs de performance de l’école qui permettent d’évaluer l’aspect qualitatif du secteur évoluent positivement mais l’abandon scolaire stagne.

Un fléau social

L’abandon scolaire est l’un des problèmes que redoutent tous les gouvernements. C’est aussi le plus délicat qu’ait à gérer le ministre marocain Chakib Benmoussa qui a élaboré une ambitieuse feuille de route pour la période 2022-2026 en vue d’atteindre une école performante et de qualité.
En effet, ce phénomène, quand il perdure et/ou se massifie, est un handicap à plusieurs impacts. Il prive le jeune de compétences pouvant assurer son insertion sociale, provoquant ainsi un déficit économique à la collectivité. Il peut générer des déviances sociales préjudiciables au concerné et à la communauté ; le jeune perdu de vue par le système éducatif sortant des radars des instances d’évaluation et de programmation des politiques publiques devient une inconnue sociale difficilement intégrable dans un mise en perspective du pays.

Sur un total de 8.863.234 élèves inscrits dans le Royaume, les abandons, toutes catégories confondues, sont de 334.664 pour l’année scolaire 2021/2022, un chiffre quasiment identique que ceux de 2019/2020 (331.558 ). Le ministère assure vouloir réduire d’un tiers ces échecs en 2026. Un vrai défi si l’on observe la stagnation du nombre de ces cas depuis plusieurs années.

La généralisation de l’enseignement progresse

Domaine positif : la généralisation de l’enseignement qui avance dans les cycles primaire et secondaire (collége.).

Une évolution identique a été relevée dans le cycle secondaire qualifiant qui a vu le taux de scolarisation atteindre 76.9 % en 2022/2023 contre 75.7 % l’année précédente. Cette courbe ascendante est également constatée pour l’enseignement préscolaire. La préscolarisation des 4-5 ans est de 76.2 % en 2022/2023 contre 72 % en 2021/2022, soit une progression de près de 4%, ce qui est considérable.
Selon le ministre, cette amélioration est essentiellement due à l’augmentation de l’offre scolaire en milieu rural qui a bénéficié du soutien de l’Initiative Nationale de Développement Humain (INDH) et de la gestion déléguée qui permet de décentraliser les centres de décisions sur un certain nombre de dossiers.
Il demeure que le spectre de l’abandon scolaire pèse toujours sur la jeunesse marocaine et, du même coup, sur les politiques de développement national qui souffrent du manque de statistiques précises quant à la situation effective de ces sujets. Or l’identification des statuts des différentes catégories d’âge est la seule manière d’ajuster les mobilisations des moyens de l’Etat à la réalité de la composante sociologique de la nation.

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Algérie. La tuberculose flambe dans les camps de migrants subsahariens

Les autorités sonnent l’alerte !

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Algérie. La tuberculose flambe dans les camps de migrants subsahariens

Officiellement, l’Algérie est considérée comme étant une « zone de transit » pour les migrants subsahariens ou d’autres réfugiés comme les syriens. De ce fait, les pouvoirs publics, et ce, de l’aveu même des services du ministère de l’intérieur et des Collectivités locales, n’ont pas entrepris des démarches efficaces pour prendre en charge ces réfugiés ou bien décider s’il fallait organiser leur raccompagnement aux frontières dans des conditions décentes. 

Plusieurs cas détectés à Alger et Blida 

Ce laxisme des autorités, s’est traduit par un essaimage incontrôlé des migrants qui vivent dans des conditions qui les exposent aux risques pathologiques ou dégradent davantage leur santé souvent chancelante. Quand des regroupements sont opérés, ils sont exécutés de manière improvisée quand ils ne sont pas le fait de migrants eux-mêmes.

Dans de telles circonstances, l’apparition de la tuberculose dans des camps de réfugiés disséminés un peu partout à travers le territoire national n’est pas vraiment une surprise. Ainsi un communiqué des services de la santé de la wilaya d’Alger, signale plusieurs foyers de cette maladie détectés au niveau de ces camps de fortunes. Des cas suspectsou avérésde tuberculose ont été signalés parmi des Subsahariens au niveau de l’établissement de santé de proximité de Larbaâ, dans la wilaya de Blida (50 kilomètres au sud-ouest de la capitale). La même note précise que certains migrants infectés, « ont refusé de se plier aux examens médicaux ». D’après ledit document, ces sujets ont également émis un refus catégorique d’être transférés au niveau d’un établissement spécialisé. Jusqu’à présent, on ignore l’ampleur des cas de tuberculose existants dans ces regroupements. Cependant, le ministère de l’Intérieur algérien, vient de donner l’alerte à travers les 48 wilayas du pays, dans le but de renforcer la vigilance et la prise en charge des cas contaminés. Une information qui ne manque de réveiller des réactions de xénophobie latentes. A la fin des années 70, la tuberculose avait été éradiquée en Algérie qui avait été alors rattachée à la zone Europe par l’OMS. La maladie a commencé à réapparaitre en même temps que certaines pathologies épidémiques au milieu des années 2000.

Les migrants se sédentarisent dans la misère 

« Je le dis devant vous et défie quiconque de me prouver le contraire, l’Etat algérien n’a lésiné sur aucun moyen afin de prendre en charge d’une manière royale, les réfugiés présents sur notre sur notre sol », a assuré récemment la présidente du Croissant rouge algérien ( CRA), Mme Ibtissem Hamlaoui. Sauf que ces déclarations péremptoires, contrastent avec la réalité du terrain. En effet, Blida qui compte l’un des plus importants camps de réfugiés du centre du pays, donne un spectacle sensiblement différent de la « manière royale » que décrit madame Hamlaoui. Et contrairement à ce qu’avancent les autorités locales, Blida, s’est au fil des années, muée de zone transit en lieu d’implantation ou plutôt de sédentarisation des réfugiés maliens ou nigériens. Ce phénomène est aisément vérifiable du côté de la région est de la wilaya où des camps se sont constitués de façon aléatoire. Et faute de prise en charge sérieuse et rapide, ces transplantés, n’ont d’autres choix que de s’adonner à la mendicité pour subsister. Il n’est pas rare que ces réfugiés, notamment des femmes et enfants, fassent, du porte à porte pour demander des denrées de première nécessité ou de l’argent afin de pouvoir s’acheter du pain et un sachet de lait quand il est disponible.  

Concurrence féroce à la mendicité 

Dans la localité de Haï Drioueche ( centre de Blida), les migrants s’entassent dans des recoins plus ou moins discrets pour échapper aux interpella            tions de citoyens perturbés par ces présences. Nous avons pu assister à une scène assez étonnante : une femme d’une trentaine d’années, qui se dit originaire du Mali, vêtue de haillons, était allongée sous un arbre, avec à ses côtés un bébé recouvert d’une couche de crasse et qui était dans un état de santé plutôt inquiétant. A côté d’elle, une mendiante « locale », la fixait du regard. Devant l’attitude manifestement hostile de la seconde, la première, a dû rapidement changer de place. Il faut dire que les mendiants s’attribuent un territoire qu’ils défendent contre d’éventuels intrus. Et dans ces appropriations, la misère autochtone fait valoir sa préférence nationale.

D’autres réfugiés, selon toute vraisemblance de nationalité syrienne, occupent, toujours avec femmes et enfants, le milieu de la chaussée sur les routes à grande circulation en brandissant des pancartes où il est mentionné « Aidez-nous, nous sommes des réfugiés syriens ».  Ces familles, installées à l’entrée ou à la sortie des localités voisines de Blida, prennent des risques inconsidérés en s’exposant au danger que représentent les véhicules de gros tonnage qui peuvent les frôler au passage sous le regard souvent réprobateur, quelques fois compatissant, des usagers de la route. Outre la misère dans laquelle survivent ces migrants, un autre danger les guette : la traite humaine. 

Les « négriers » des temps modernes 

Dans certains cas, les migrants sont les victimes de personnes malintentionnées qui les font travailler pour un salaire de misère et dans des conditions insupportables. Pour rappel, en décembre 2021, les services de sécurité d’Alger, ont réussi à démanteler un vaste réseau qui exploitait leurs proies. Ce groupe de « négriers » des temps modernes, était composé de six individus.  Son mode opératoire était assez simple : faire venir des dizaines de migrants africains ou quelques fois marocains, de la périphérie d’Alger, de Béjaïa ou d’ailleurs. Ils sont accueillis ensuite au niveau de la gare routière de Kharouba avant d’être enfin acheminés vers les divers chantiers du pays où ils sont employés pour une bouchée de pain et surtout dans la plus parfaite clandestinité. Ce coup de filet avait mis un terme à un trafic qui aurait rapporté à ses instigateurs plus de 100.000 euros, selon des sources policières. L’exploitation avait duré plus d’une année.

Cette situation vient rappeler que les mesures prises par l’Union européenne pour enrayer ou du moins contenir les flux migratoires et qui sont appelés à se renforcer font et feront de l’Algérie, non plus une zone de transit mais un réceptacle de l’immigration clandestine. Avec tout ce que cela implique comme problèmes sanitaires, désordres sociaux et réaction de rejet que l’Algérien est prompt à dénoncer…quand ils sont constatés ailleurs.

R.B

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En Tunisie, des livres censurés au Salon du livre rappellent les méthodes de Ben Ali

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En Tunisie, des livres censurés au Salon du livre rappellent les méthodes de Ben Ali

Les versions se suivent et se contredisent depuis l’inauguration de la Foire internationale du livre de Tunis, malgré un précédent inquiétant. Peu de temps après la visite du président tunisien Kaïs Saïed vendredi 28 avril, la stupéfaction et la colère se sont propagées dans les rangs des éditeurs et libraires venus exposer leurs livres à l’occasion d’un rendez-vous annuel d’une grande importance pour les professionnels du secteur. Les responsables de la maison d’édition Dar Al Kitab (La Maison du livre) ont été sommés de fermer leur stand. 

Le livre nouvelle victime de Kais Saied

En cause ? La présence d’un essai politique, Le Frankenstein tunisien, de l’écrivain Kamel Riahi. La couverture verte du livre représente une caricature de Kaïs Saïed dépeint comme le monstre créé par le Docteur Frankenstein dans le roman célèbre de Mary Shelley. L’auteur y critique le coup d’État du 25 juillet 2021 opéré par Kaïs Saïed, une créature née des déceptions du peuple tunisien depuis la révolution. “Pour la première fois en 37 ans de Foires du Livre de Tunis, un stand est fermé par les autorités. C’est une première”, écrit Karim Ben Smaïl, propriétaire des éditions Cérès. Pour exprimer leur solidarité, plusieurs exposants ont décidé de fermer leur stand à leur tour, le jour-même. 

Le lendemain, samedi 29 avril, au moins deux autres livres manquent à l’appel : Kaïs 1er, président d’un bateau ivre, un essai politique en langue arabe du journaliste Nizar Bahloul ainsi que Le chiisme en Tunisie, de Slaheddine Amri. Ces livres ont pu être exposés de nouveau peu de temps après. Face aux journalistes, et après avoir pu rouvrir son stand sans le premier livre incriminé, Habib Zoghbi, directeur de Dar Al Kitab, tente d’arrondir les angles et invoque des délais administratifs.

Censure honteuse

Qui a pris la décision de fermer le stand de l’éditeur et de saisir les copies de ces publications ? Jusqu’au lundi 1er mai, les versions de Dar Al Kitab comme de la direction de la Foire internationale du livre de Tunis (FILT) se contredisent. Les dernières informations font état d’une décision prise par des agents chargés par le ministère de la Culture d’assurer la sécurité des lieux. La direction de la FILT avance des problèmes administratifs et de listes complémentaires arrivées trop tard.

Lors d’un point presse tenu le dimanche 30 avril, la directrice de la FILT, entourée des membres de son comité d’organisation, a fustigé une polémique qui a “touché à l’image de la Tunisie dans les médias internationaux” et accusé ses détracteurs d’avoir “trompé” l’opinion et de s’être rendus coupables de propos “diffamatoires”. Pour autant, et sans donner plus d’explications, elle indique que les livres ayant été saisis le 29 avril seront de nouveau exposés. Karim Ben Smaïl a salué de son côté une “déclaration courageuse” estimant que “la présidente du comité d’organisation de la Foire remet sa ministre au pas”, évoquant ainsi un différend ayant opposé le ministère de la Culture au comité d’organisation. “Au moins un des livres saisis a été remis en vente, un titre qui a plus de trois ans… et qui s’est vendu en un jour! Merci qui ?”, a-t-il ironisé. 

Sauf que la polémique ne s’est pas arrêtée là et Habib Zoghbi dénonce une nouvelle manipulation. En effet, Le Frankenstein tunisien a été confisqué le 28 avril et ne serait pas inclus dans la liste des livres pour lesquels l’interdiction a été levée. “Jusqu’à quel point essaie-t-on de manipuler les gens ? Je vous informe que le livre est encore saisi jusqu’à présent, sans document officiel ni décision de justice”

“Cette dernière édition de la FILT n’a pas fini de nous surprendre”, a prédit plus tôt Karim Ben Smail, dénonçant les “cafouillages, marche arrière, et amateurismes”. 

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