dimanche, décembre 3, 2023
Politique

TUNISIE : LA COVID–19 AU SERVICE DE KAIS SAIED

Couvre-feu de 22h00 à 05h00 du matin et annulation de tous les rassemblements dans les espaces fermés et ouverts. C’est ce qu’annonce dans un communiqué publié mercredi 12 janvier 2022 la présidence du gouvernement tunisien. Ces mesures anti-Covid entrent en vigueur le 13 janvier pour une durée de deux semaines renouvelables si la situation sanitaire l’exige. Le gouvernement n’a annoncé aucune mesure d’accompagnement pour les secteurs d’activités qui seront impactés par de telles mesures. Il se contente de recommander le recours au télétravail, le respect du protocole sanitaire en place et notamment des gestes barrière. Il affirme qu’il va intensifier les contrôles des pass vaccinaux (ce qu’il a été incapable d’imposer jusqu’ici depuis sa mise en place le 22 décembre dernier) ainsi que les campagnes de vaccination et les mesures de contrôle aux frontières.

Est-ce un hasard que l’interdiction des rassemblements et la demande d’éviter les déplacements à l’intérieur du pays, interviennent deux jours avant des manifestations prévues le 14 janvier contre le président Kais Saied…

4865 nouveaux cas de Covid-19 ont été détectés sur près de 20.000 tests de dépistage, soit un taux de positivité de 24,40%, selon les chiffres du ministère de la Santé donnés le 11 janvier 2022.

Si la pandémie est effectivement repartie à la hausse en Tunisie ces derniers jours, beaucoup d’observateurs remarquent que de nombreux pays qui font face à une situation sanitaire bien plus inquiétante qu’en Tunisie, la France notamment, n’ont pas interdit les manifestations malgré les centaines de milliers de nouvelles contaminations quotidiennes et des taux d’incidence bien plus élevés (100 cas pour 100 000 habitants en Tunisie contre 2800 pour 100 000 en France). 

Est-ce un hasard que l’interdiction des rassemblements et la demande d’éviter les déplacements à l’intérieur du pays, interviennent deux jours avant des manifestations prévues le 14 janvier contre le président Kais Saied à l’appel de plusieurs mouvements et partis politiques, s’interroge Reuters.

Aucun doute pour les dirigeants de l’opposition, d’autant que le Gouverneur de Tunis avait déjà annoncé le 10 janvier qu’il n’autoriserait aucune manifestation le 14 janvier. 

Pour Issam Chebbi, secrétaire général du Parti Al Djoumhouri « ces mesures ont été prises pour empêcher les opposants du président de la République Kais Saied de descendre dans la rue pour célébrer la fête de la Révolution, dénoncer le régime autocratique et réclamer le retour à la démocratie ». Il ajoute dans une déclaration au site Tunisie Numérique : « les autorités auraient pu durcir les mesures préventives sans avoir recours à l’interdiction de tous les événements (…) Nous nous attachons à nos droits et cela ne va pas nous empêcher de descendre dans la rue le 14 janvier pour prouver au monde entier que la Tunisie fait face à un régime autocratique

« Nous serons dans la rue de la Révolution (Avenue Habib Bourguiba à Tunis, ndlr) pour protester coûte que coûte », a surenchéri Ghazi Chaouachi, chef du parti Attayar, qui était pourtant encore un soutien de Kais Saied, il y a moins d’un an et aujourd’hui l’un de ses plus farouches détracteurs.

Sans préjuger de la capacité de l’opposition à mobiliser massivement le 14 janvier si ces mesures d’interdictions n’étaient pas intervenues, il est évident que ces restrictions sous couvert de crise sanitaire, visent à éviter à Kais Saied d’être confronté au test de la rue à quelques jours du lancement poussif de la « consultation nationale populaire », sorte de référendum-sondage par Internet, que le président présente comme la matrice  de son projet de refondation des institutions de la Tunisie . Du pain bénit en somme ce Covid-19 ! 

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