UKRAINE. ÉTUDIANTS AFRICAINS, L’ENFER DU DANGER ET DU REJET
La Tunisie annonce ce premier mars avoir rapatrié par avion militaire des étudiants qui ont pu atteindre la Roumanie. Au Maroc, des vols spéciaux de la RAM ont atterri à Casablanca avec à bord plus de 1.500 ressortissants dont la plupart sont également des étudiants. L’Algérie qui a perdu le 26 février un étudiant de 24 ans mort des suites de ses blessures, a fait savoir par son ministère des Affaires étrangères que les « représentations diplomatiques ont pris les mesures nécessaires pour faciliter l’entrée de nos ressortissants », sans donner plus de précision.
Le Maroc compte environ 12.000 de ses citoyens vivant en Ukraine, la Tunisie 1.700 et la Libye 3.000. On ne connait pas le nombre d’Algériens expatriés dans ce pays.
Les autorités des pays nord-africains invitent toutes leurs ressortissants à prendre attache avec leurs représentations consulaires sitôt parvenus à l’un des pays situés sur le flanc occidental ukrainien. Le problème est que les appels de détresse lancés par ces jeunes témoignent de la difficulté voire de l’impossibilité à sortir d’Ukraine. Et cela pour plusieurs raisons. Des universités exigent le dépôt des passeports des inscrits auprès de leur administration, ce qui prive leurs propriétaires de documents de voyage et rend encore plus problématique le franchissement des frontières pour ceux qui ont pu les atteindre. À ce problème s’ajoutent le manque d’argent et, plus grave, les discriminations dont sont victimes les étudiants africains, notamment à la frontière polonaise, comme on peut le voir sur des témoignages postés sur la toile par certains de ceux qui se sont vus interdire l’entrée sur le sol polonais alors que les garde-frontières laissent passer devant eux des Ukrainiens. Le scandale est tel qu’il a provoqué des remous jusque dans les travées de l’ONU où des ambassadeurs africains ont officiellement dénoncé ces ségrégations.
Cette situation est le résultat de la mauvaise anticipation des évènements, les pays d’Afrique du nord, comme beaucoup d’autres, n’ayant pas cru à l’invasion de l’Ukraine. Certains gouvernements, comme l’algérien, ne voulant pas froisser la Russie à laquelle le lient des intérêts militaires puissants, se sont gardés d’informer leurs ressortissants sur les risques de dégradation de la situation à la suite de l’invasion engagée par Moscou.
Aujourd’hui encore, des centaines de jeunes sont piégés à Kiev, Kharkiv ou Odessa. Ils sont isolés, dans l’insécurité et le dénuement. Un enfer témoigne Youcef, un étudiant en architecture arrivé à Tunis ce mardi.