LA CRISE ALGÉRO-ESPAGNOLE REBONDIT À BRUXELLES
C’est le ministère des Affaires étrangères algérien qui est monté au créneau ce samedi pour réagir aux interpellations et menaces de l’Union européenne suite à la décision de suspension du traité d’amitié avec l’Espagne. Dans un premier temps, Alger s’était contenté de faire intervenir son ambassadeur à Bruxelles après la déclaration d’une porte-parole de l’Union européenne qui avait jugé la situation préoccupante et invité l’Algérie à revenir sur sa décision.
Vendredi, ce sont deux hauts responsables de l’UE qui ont formellement adressé des avertissements au gouvernement algérien n’hésitant pas à envisager l’éventualité de représailles.
C’est alors que le département de Ramtane Lamamra a tenu à exprimer son incompréhension et son désaccord avec Bruxelles : « L’Algérie déplore et rejette les déclarations hâtives et infondées faites hier au nom de l’Union européenne à la suite de la décision souveraine prise par l’Algérie de suspendre le Traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération la liant à l’Espagne », lit-on dans le long communiqué qui dénonce par ailleurs « Cette intrusion malencontreuse (qui) est le fait d’une personnalité manifestement commise à l’amplification des thèses de sa diplomatie nationale au détriment de la préservation des intérêts bien compris de l’Union européenne au sein de laquelle l’Algérie s’honore de compter de nombreux amis et partenaires fiables et responsables ». Alger qui ne désigne pas la nationalité de la personne accusée d’abuser de sa fonction européenne pour amplifier les thèses de son pays fait valoir que sa décision de suspendre le traité qui la liait à l’Espagne est inspirée par des « considérations légitimes, qui tiennent pour l’essentiel à ce que le partenaire se soit délié d’obligations et de valeurs essentielles inscrites dans ce Traité, prenant ainsi la responsabilité de vider cet instrument juridique de sa substance et de mettre en cause sa pertinence dans les relations entre les deux parties audit traité ».
Déterminé à relever ce qui risque de prendre l’allure d’un bras de fer diplomatique avec Bruxelles, l’Algérie n’hésite pas à pointer une ambivalence de l’UE qui se serait rendue coupable de traitement « douteux et paradoxal » sur d’autres dossiers. Et de relever « la posture circonspecte de la Commission européenne dans le cas récent d’un contentieux commercial majeur concernant un État-clé de l’Union qui a été amené à rappeler ses ambassadeurs auprès de deux États développés non-européens avec lesquels il était en conflit d’intérêts ».
L’Espagne n’étant pas prête de revenir sur son nouveau positionnement à propos du Sahara occidental, on peut supposer que la polémique va durer voire s’aggraver. Alger joue le rapport de force ; fournisseur de gaz dans une conjoncture de contraction de l’offre, les turbulences du marché la mettent à l’abri de réactions brutales et immédiates de l’UE. « Prenons garde à ne pas abuser de notre avantage. Les diatribes lancées contre la Banque mondiale et l’Unesco, toujours à cause des tensions qui nous opposent au Maroc, ont laissé des traces. Il faudrait éviter que ce différend n’aliène l’ensemble de notre diplomatie », avertit un constitutionnaliste pourtant proche du cercle présidentiel puisque qu’il fit partie des personnalités sollicitées pour la révision de la constitution.