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LƐID AMEGGAZ  صاحا عيدكم  BONNE FÊTE DE L’AÏD

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Montréal. Le raï : des cabarets oranais à l’Unesco

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Montréal. Le raï : des cabarets oranais à l’Unesco

La musique raï, née de la fusion de deux formes de mélodies traditionnelles, le bédoui et le folklore oranais, a connu une évolution fabuleuse qui l’a propulsée des tripots – que beaucoup considéraient comme les lieux où végétait les bas-fonds de la société – au firmament du monde et devenir patrimoine immatériel universel reconnu par l’Unesco.

C’est l’histoire exceptionnelle du raï et ses origines qu’a tentée d’ébaucher samedi Mohammed Nadir Hales, un ingénieur éclectique, qui a plusieurs cordes à son arc. Invité dans le cadre des Journées du patrimoine culturel algérien programmées par la très active organisation indépendante Écomusée de l’Algérie (ÉDA), en collaboration avec le Musée des métiers d’art du Québec (MUMAQ), le conférencier est revenu longuement sur la genèse de ce genre musical populaire qui, après avoir été porté par la voix des chouyoukhs ( les maitres ) , a connu un début de modernisation avec l’éclosion de meddahates ( les conteuses ).

Dans l’introduction de sa thématique, M. Hales est remonté loin dans l’histoire du bédoui, allant jusqu’à évoquer les chants traditionnels des Zendani de la fin du 19 siècle et du début du 20 siècle comme le chant de résistance « Hadj Guillaume » qui persifflait contre l’occupant colonial.

« Bakhta », une histoire d’amour véridique

Au début du 20e siècle, le raï balbutiant était porté par des chouyoukhs, dont les plus emblématiques à l’époque étaient Cheikh Hammada et Abdelkader Khaldi. Ce dernier, né en 1896 à Mascara, faisait partie de la génération de poètes qui ont participé à la citadinisation du bédoui dans une période charnière de bouillonnement culturel algérien. Il était notamment auteur du texte inusité « Bakhta », une idylle vraie qui deviendra bien plus tard un tube repris par Cheb Khaled.

Avant lui, Abdelkader Bentobdji (1871 – 1948), un poète mystique, avait laissé à la postérité un texte d’anthologie en l’honneur du saint Sidi-El Houari, « Abdelkader ya Boualem », également repris par plusieurs chanteurs ultérieurement.

Deux autres pionniers de la musique populaire oranaise, en l’occurrence Ahmed Wahbi et Houari Bellaoui, ont également contribué au rayonnement de ce genre musical durant les années 1950.  

Avec l’introduction de nouvelles sonorités grâce à la modernisation de l’orchestration, le le raï a connu une évolution qualitative avec l’émergence d’une nouvelle génération d’artistes qui l’ont popularisé à partir des cabarets oranais. Le conférencier cite notamment cheikha Rimiti, une icône de la musique populaire féminine, Messaoud Bellemou et Belkacem Bouteldja, des précurseurs du raï moderne, qui ont su donner un second souffle à cette musique subversive avec l’introduction de nouveaux instruments  comme la trompette et l’incorporation de sons électriques, alors que ce genre musical fut longtemps interdit dans les médias officiels.

Des cabarets oranais à l’Unesco

Il a fallu attendre le milieu des années 1980 pour voir un début de libéralisation du raï à l’occasion du premier festival à Oran avant de s’internationaliser avec la voix d’une nouvelle vague de chanteurs, dont Khaled, Mami et chebba Fadila, indique l’intervenant.

La montée en puissance du raï dans une période trouble de l’Algérie avait fait retourner les kalachnikovs des groupes terroristes islamistes contre des artistes qui voulaient chanter l’amour et l’espoir dans un pays assassiné par « les chasseurs de lumière ». L’on se souvient de l’enfant de Gambetta, Cheb Hasni, froidement abattu en 1994 à la fleur de l’âge, lui qui chantait « Mazal kayen l’espoir » ( il reste encore de l’espoir) . Une année plus tard, le producteur Rachid Baba Ahmed subira le même sort.

Mais cet espoir têtu aura raison de la bête immonde, vaincue par la société algérienne. Le raï qui s’est imposé depuis sur les scènes internationales les plus mythiques est, aujourd’hui, un patrimoine immatériel universel. Le raï célébré par les chouyoukhs et les meddahates aura ainsi pris sa revanche sur tous ceux qui ont voulu le proscrire chez les disquaires, à l’antenne et sur scène.

Contrarié autant par le conservatisme social que les censures officielles et combattu par les sicaires intégristes, le raï a miraculeusement survécu. Est-ce un hasard si dans le retour de la bigoterie en Algérie c’est encore dans la diaspora que l’on célèbre la profondeur d’une musique dont le mot qui la définit signifie « esprit », un mot qui célèbre la liberté de décider de soi ?  

De Montréal : Nadir B.

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Maroc. Le nouvel an amazigh sera désormais un jour férié

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Maroc. Le nouvel an amazigh sera désormais un jour férié

Dans un communiqué du cabinet royal publié ce mercredi, on apprend que «  le Nouvel an amazigh sera un jour de congé payé à l’instar du 1er Moharem ou du jour de l’an grégorien ».

Le communiqué indique que le Roi Mohamed VI a donné des instructions au chef du gouvernement prendre les mesures nécessaires afin d’activer cette décision.

L’écrit du cabinet royal explique que cette annonce consacre « l’attention bienveillante que sa S.M le Roi n’a cessé de porter à l’amazighité en tant que composante principale de l’identité marocaine. Une décision qui s’inscrit également dans « le cadre de la consécration constitutionnelle de l’Amazigh comme langue officielle aux côtés de la langue arabe. » Cette décision répond à une demande récurrente des militants de la cause amazigh qui se sont rassemblé cette année encore devant le parlement pour demander que Yennayer, la Nouvel an amazigh soit officiellement reconnu.

Pour rappel, en ‘Algérie une décision présidentielle annoncée le 27 décembre 2017 avait de Yennayer un jour chômé et payé qui fut fêté pour la première fois le 12 janvier 2018.

Rassemblement organisé par les militants amazigh devant le parlement en début d'année revendiquant l'officialisation du nouvel an amazigh.
Rassemblement organisé par les militants amazigh devant le parlement en début d’année revendiquant l’officialisation du nouvel an amazigh.
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Témoignage: IDIR 3 ans déjà. Par : Mounir KEJJI*

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Témoignage: IDIR 3 ans déjà. Par : Mounir KEJJI*

IDIR a tiré sa révérence il y’a trois ans. J’ai pensé à lui non pas comme un disparu mais comme un absent, un émigré comme en tant connus sa Kabylie natale. Un manque nous habite mais ll n’y a pas de résignation à ne plus retrouver l’être cher. Pourquoi ? Parce que Idir est incontestablement le chanteur qui a donné un rayonnement international à la chanson amazighe. Et quand on a traversé tant de frontières ; celle de la mort ne peut être une barrière définitive. J’ai donc voulu parler de lui simplement aujourd’hui comme s’il allait bientôt revenir au Maroc.

Qui de nous n’a pas écouté et admiré l’éternelle et planétaire chanson « Avava inu va » et ses autres mélodies puisées du patrimoine amazigh plusieurs fois millénaire? Qui de nous n’a pas parcouru des centaines voire des milliers de kilomètres en groupe ou en solo, accompagné de ses belles mélodies?

« Avava inu va » a été chantée en 1973, interprétée et adaptée dans une vingtaine de langues.. Elle a même fait sa place dans la musicothérapie dans des cliniques en Europe pour atténuer les souffrances et les émotions négatives des patients.

IDIR a sillonné le monde pour faire connaître, à travers la musique, notre langue et notre culture. Et il l’a fait avec brio .Il était l’ambassadeur par excellence de la musique et de la culture amazighe. Il était un des « maquisards de la chanson » kabyle pour reprendre l’expression de Kateb Yacine.

Je l’ai rencontré la première fois le 5 mai 1997 à Rabat à l’hôtel de Challah, invité au festival qui se déroulait dans la même ville. C’était son deuxième spectacle au Maroc, après celui de Casablanca en 1995 où il a été invité par l’Institut français …

Puis avec les années, il était un habitué du Maroc qu’il visitait souvent plus que l’Algérie ( mais ceci est un autre sujet…).

J’ai eu l’honneur d’assister à ses concerts à Meknès, à Agadir, à Tanger, à Rabat, à Kenitra, à El Houceima, où il a tenu à donner un spectacle le 7 août 2004 en solidarité avec la population de la ville, traumatisée par un terrible tremblement de terre le 24 février de la même année.

Je faisais partie d’un groupe de jeunes venus de Rabat pour assister à cette manifestation solidarité. Il nous a reçus chaleureusement après le gala dans son hôtel Chafarina Beach à Tara Youssef (à quelques kilomètres d’El Houceima).

IDIR draine toujours des foules immenses auxquelles il fait partager ses passions et ses engagements.

Le géologue qui est devenu artiste est une force révolutionnaire qui agit en douceur et en profondeur. Il a pu, à travers son art, stimuler les esprits contre le danger de l’aliénation culturelle que voulait instaurer l’arabo-islamisme en Afrique du Nord. Il était un éveilleur des consciences.

La dernière fois que je l’ai vu, il m’avait dit qu’il voulait venir se reposer au Maroc pour une semaine ou une dizaine de jours et qu’il désirait visiter quelques villages du Moyen Atlas, la région d’Imilchil, Goulmima, Merzouga, les Gorges de Todgha, celles de Dadès…

J’en ai discuté avec notre ami commun Rabah Tafsut pour coordonner le programme et le timing. Malheureusement, le projet n’a pas abouti. La maladie fut plus forte que le souhait de notre artiste.

Dans son dernier album « Ici et ailleurs », sorti en 2017, il s’est fait entourer par de grandes voix de la chanson française tels Francis Cabrel, Patrick Bruel, Charles Aznavour, avec qui il a chanté La Bohème en kabyle …

Repose en paix Dda YIDIR ! Ton très large public à travers toute Tamazgha et le Monde entier te pleure ! Il te pleure d’autant plus qu’avec le confinement, il n’a pas pu t’organiser des obsèques dignes de ta personne et de la place de premier choix que tu occupes dans l’Histoire et dans le devenir de la culture et de la nation amazighes.

Mais, comme tu le sais bien, ton nom, ta voix, tes paroles et ta musique sont gravées pour l’éternité dans nos cœurs et dans notre Histoire.

Ar timlilit a DdA YIDIR

*Militant de la cause amazighe au Maroc

Photo : Idir avec sa fille Tanina et Mounir Kejji devant l’Hôtel Ibis à Rabat en juillet 2014

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« Djbel Moussa » du Marocain Driss Mrini primé au festival Vues d’Afrique

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39e édition du Festival international Vues d’Afrique

Le festival de cinéma international « Vues d’Afrique » a dévoilé dimanche à Montréal les lauréats de sa 39eme édition qui s’est déroulée à la Cinémathèque québécoise du 21 au 30 avril. 

Déjà salué par la critique, le long métrage « Djbel Moussa » (Le Mont Moussa) du Marocain Drisss Mrini a été sacré meilleur film en décrochant le prix du long métrage fiction. Adaptée de l’œuvre de Abderrahim Bahir, le film du réalisateur Mrini met en scène Hakim, un jeune aphasique reclus cloué à son fauteuil roulant, qui a choisi de vivre à la marge du monde, seul face à ses démons intérieurs. Par un pur hasard, Merouane croise Hakim et semble gagné par une sorte de curiosité sur les univers secrets de ce dernier. Ce qui ne sera pas sans conséquences sur Merouane dans cette intrigue qui a fini par attirer l’attention du jury et du public. 

Dans la même catégorie, le film algérien « Houria » de la scénariste Mounia Meddour s’est contenté d’une mention spéciale. Par contre, ce long métrage a raflé le prix de la meilleure musique de film attribué à Yasmine Meddour et Maxence Dussere. Autre distinction pour la fiction de Mounia Meddour, Lyna Khoudri qui a joué le rôle de Houria a été sacrée meilleure actrice, tandis que Younes Bouab, qui a campé le rôle de Hakim dans « Le Mont Moussa », s’est vu décerner le prix du meilleur acteur.  

Le festival a aussi remis un prix hommage en reconnaissance de l’ensemble de l’œuvre du Malien Souleymane Cissé, premier cinéaste d’Afrique noire à recevoir en 1987 le prix du jury au Festival de Cannes pour son film « Yeelen ».

Tout au long du festival, plusieurs activités connexes ont eu lieu pour mettre en valeur les spécificités culturelles africaines avec notamment de nombreux concerts et spectacles consacrés à des pays comme le Mali, l’Algérie, le Maroc, le Burkina Faso. 

Par ailleurs, lors d’une cérémonie organisée à la mairie de Montréal, le festival Vues d’Afrique a formalisé le jumelage avec le festival de cinéma de Kigali (Rwanda), alors qu’auparavant un colloque universitaire s’est penché sur la question de la décolonisation des festivals. Le festival Vues d’Afrique qui souhaite faire les choses en grand a d’ores et déjà annoncé les préparatifs pour sa 40e édition qui aura lieu du 11 au 21 avril 2024. 

De Montréal : Younes Lamri 

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Le patrimoine culturel algérien s’expose à Montréal

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Les Journées du patrimoine culturel algérien sont organisées du 28 avril au 10 juin à Montréal à l’initiative de l’organisation indépendante Écomusée de l’Algérie (ÉDA), en collaboration avec le Musée des métiers d’art du Québec (MUMAQ) de Montréal.

L’Écomusée de l’Algérie est un organisme à but non lucratif qui a vu le jour en septembre 2021 à Montréal. Sa naissance est venue répondre au besoin exprimé par la communauté algérienne qui aspirait à  rassemblée autour d’une bannière commune, celle du patrimoine culturel, explique Asma Aït Hamouda.

Le programme culturel sera inauguré par le vernissage d’une exposition prévu pour ce jeudi au siège du MUMAQ. Cette activité temporaire se veut une fenêtre ouverte sur le patrimoine algérien dans toute sa diversité ; qu’il s’agisse de trésors matériels ou immatériels qui ont survécu aux épreuves du temps et qui sont là depuis les jours anciens.

Outre une sélection d’objets culturels du patrimoine algérien, le programme dévoilé par les organisateurs comprend plusieurs activités qui regroupent des ateliers créatifs et des conférences thématiques sur le cinéma, l’architecture, la musique, la littérature et la peinture. La manifestation sera ouverte jusqu’au 10 juin et le public aura le loisir de faire la (re)découverte d’un patrimoine culturel qui appelle à sa sauvegarde pour ne pas se laisser mourir, une éventualité qu’il ne faut malheureusement pas exclure s’il devait rester plus longtemps en jachère.

Ainsi, le public montréalais verra la beauté des costumes traditionnels algériens, de la diandrie, de la maroquinerie, de la gastronomie, de la poésie et de la musique du terroir. Les visiteurs et spectateurs se laisseront transporter dans un monde merveilleux où les codes culturels participent à régenter la vie sociale dans la cité ou le monde rural.

Parallèlement à cette méga-exposition, l’Écomusée de l’Algérie organise samedi un atelier créatif de peinture participative pour une fresque collaborative avec l’artiste-peintre Ali Kichou. Ce dernier a été déjà à l’origine d’une fresque du même genre créée avec le public à Montréal lors des manifestations qui faisaient écho à celles du pays. Après le coup de pinceau de M. Kichou qui reviendra avec son atelier chaque samedi, le programme mettra à l’honneur la littérature orale féminine avec des séances dédiées à la boqala animées par Nacira Adem.

Durant ces Journées, ÉDA propose chaque samedi une conférence thématique. « Rapport identitaire du patrimoine architectural algérien entre histoire et modernité » sera le thème qu’abordera Miloud Boukhira samedi le 6 mai, alors qu’une semaine plus tard, Mouloud Belabdi dissertera sur la « promenade au sein de la littérature algérienne de graphie française ». Nylda Aktouf et le Dr Miloud Chennoufi aborderont des sujets relatifs à l’art plastique sur Baya l’enchanteresse et le corps dans l’art algérien chez les fondateurs de la peinture moderne. Les cinéastes Nadia Zouaoui e Bachir Bensaddek reviendront le 20 mai prochain sur les succès et les défis du cinéma d’ici, tandis que le 3 juin Mohammed Nadir Hales résumera l’histoire et l’évolution de la musique raï oranaise.

Nadir B.

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Appel. 43ème PRINTEMPS BERBÈRE/AMAZIGH : MARCHE DES DIASPORAS AMAZIGHES À PARIS

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Appel. 43ème PRINTEMPS BERBÈRE/AMAZIGH : MARCHE DES DIASPORAS AMAZIGHES À PARIS

Appel aux Amazighs des diasporas de tous les pays : Algérie, Burkina Faso, Égypte, Îles Canaries, Libye, Mali, Maroc, Mauritanie, Niger, Soudan, Tchad et Tunisie.
Appel aux amis et soutiens des Amazighs
.

Le 20 avril 1980, date anniversaire du printemps berbère/amazigh, est un repère historique majeur pour les peuples amazighs d’Afrique du Nord, du Sahel et de l’archipel des Canaries, constituant la terre de Tamazgha.


Dans un mouvement irréversible de l’Histoire, cette date emblématique traduit l’aspiration des Amazighs à l’affirmation et à la réappropriation de leur identité, ainsi qu’à la reconnaissance de leurs langues souvent menacées, voire en voie de disparition.


Aujourd’hui, malgré quelques acquis obtenus de haute lutte, les peuples amazighs demeurent discriminés et leurs droits humains les plus élémentaires sont bafoués : droit à la vie et à la sécurité, droits politiques, droits culturels et linguistiques, droits socio-économiques, ainsi que leurs droits à un environnement sans péril écologique.


Les peuples d’Afrique du Nord et du Sahel font face à des situations conflictuelles qui menacent la paix dans toute cette région. Les conflits armés au Sahel, les tensions menaçantes entre l’Algérie et le Maroc, l’instabilité libyenne persistante, l’autoritarisme des États et les intérêts en jeu des grandes puissances font l’actualité tourmentée et inquiétante de cette Afrique septentrionale.


En commémoration du double combat du printemps berbère/amazigh pour la reconnaissance identitaire et pour les libertés démocratiques, nous, signataires de ce texte, appelons à une marche pour :

  • La reconnaissance effective de l’identité, des cultures et des langues amazighes en adoptant une politique
    réellement volontaire par les États d’Afrique du Nord et du Sahel, ainsi que la promotion des droits linguistiques
    des nombreux locuteurs amazighs dans les pays d’immigration.
  • L’inscription par l’UNESCO de l’alphabet amazigh, le Tifinagh, au patrimoine mondial de l’Humanité.
  • L’instauration de systèmes politiques démocratiques en adéquation avec les réalités socioculturelles et
    économiques des peuples de cet espace géographique.
  • Le respect des droits humains et particulièrement la lutte contre toute forme de racisme et de discrimination.
  • L’arrêt des répressions contre toute forme d’expression et la libération de tous les détenus d’opinion.
  • Le jugement des crimes impunis commis contre les Amazighs comme ceux du Printemps noir de Kabylie en 2001,
    des évènements de Tkout dans les Aurès en 2004, de Sidi Ifni dans le Souss au sud du Maroc en 2008, du Mzab en
    2014, des mouvements populaires rifains de 1958-59 et de 2016, ainsi que le jugement des nombreuses violences
    commises contre les communautés touarègues du Mali/Azawad et du Niger depuis les indépendances.
  • Le respect des droits des Amazighs sur leurs terres ancestrales, avec l’arrêt des spoliations foncières et la
    protection de leur environnement.
  • Assurer le développement socio-économique des populations locales avec une répartition équitable des richesses
    exploitées.
  • La recherche impérative de la paix et du vivre ensemble dans les pays de Tamazgha en favorisant par tous les
    moyens pacifiques le dialogue pour la résolution des conflits.
  • Amorcer une dynamique pour penser l’ensemble de Tamazgha en vue de l’émergence d’un bloc régional qui
    compte dans le monde.
    Cet appel à une marche des diasporas amazighes à Paris est une initiative d’un groupe de militants de la cause berbère, venant de diverses
    régions amazighes, qui veulent célébrer le printemps berbère dans l’union et la fraternité, particulièrement dans ces moments difficiles et
    menaçants que traversent les peuples de d’Afrique Nord et du Sahel.

Liste des premiers signataires :

  • Said KHELIL, biologiste, acteur du printemps berbère d’avril 1980, ex-détenu.
  • Hend SADI, professeur agrégé de mathématiques retraité, militant, écrivain et acteur du printemps berbère de 1980.
  • Aziz TARI, retraité, acteur du printemps berbère d’avril 1980 et 1981, ex-détenu (80 et 81).
  • Ali BRAHIMI, juriste, acteur du printemps berbère de 1980, ex-détenu.
  • Tassadit YACINE, anthropologue, EHESS /France.
  • Jamal El Khattabi, professeur des Universités, Vice-President de l’Universite de Lille, France.
  • HAWAD, écrivain et peintre touareg, France/Sahara.
  • Hélène CLAUDOT-HAWAD, Anthropologue, Directrice de recherche honoraire au CNRS /France.
  • Hassan ID BELKACEM, avocat, écrivain, poète, militant des droits humains et de la cause amazighe /Maroc. 
  • Kamel NAIT ZERRAD, linguiste, Professeur des universités, INALCO/France.  
  • Daniela MEROLLA, Professeure des universités en littérature et art berbères, INALCO/France.
  • Hamma AG MAHMOUD, ex-ministre malien, défenseur des droits des Touaregs. 
  • Annie MECILI, épouse d’Ali MECILI /France.
  • Mokrane GACEM, journaliste, acteur du printemps berbère de 1980 /France.
  • Mohand NAIT ABDALLAH, ancien détenu de 80, poète et écrivain en Tamazight /Algérie.
  • Pierre Vermeren, professeur des universités, spécialiste de l’histoire d’Afrique du Nord (Sorbonne et IMAF) /France.
  • Mohand Larbi BOUTRID (Nacer), architecte, ancien détenu des évènements du 19 mai 1981.
  • Boukhalfa BELLACHE, détenu kabyle du printemps berbère de 1981 /France.
  • Rachid RIDOUANE, linguiste, directeur de recherche au CNRS /France.
  • Moussa AG ASSARID, président de l’association Solidarité Azawad /France.
  • Abderrahman EL AISSATI, chercheur, maître de conférences à l’université de Tilburg, spécialiste de la question amazighe / Pays-Bas.
  • Mokrane AGOUNE, militant berbériste, ancien détenu de 1981 /France.
  • Djamel MEGUELLATI, détenu des évènements du 19 mai 1981. 
  • Nacer YANAT, artiste, créateur de « Artiviste sans frontières » et ex-détenu de 1981/ France.
  • Youcef HEBIB, ancien militant de l’Académie Berbère, président de l’Association des Amis de l’Académie Berbère /France.
  • Aissa RAHMOUNE, vice-président de la FIDH.
  • Said SALHI, défenseur des droits humains, Bruxelles. 
  • Ali AIT DJOUDI, militant des droits humains/France.
  • Mohamed BENCHICOU, journaliste et écrivain /France.
  • Ali AMRANE, artiste /France.
  • Samia AMMOUR, artiste, militante politique/France.
  • Boujama TAOUTOUN, Artiste Rifain /Allemagne.
  • Mustapha HARZOUNE, historien, acteur associatif, France.
  • Aumer U LAMARA, physicien, écrivain amazigh, France. 
  • Boujmaa MAGHNOUJI, militant du mouvement amazigh aux Pays-Bas, acteur associatif rifain en Europe.
  • Brahim TIMEZGHINE, militant des droits du Mzab /Québec.
  • Rachid RAHA, Président de l’Assemblée Mondiale Amazighe/ Belgique.
  • Salah ABBOUNA activiste des droits de l’homme et membre fondateur de l’ONG Tifaout Taghrdayt /Espagne.
  • Hafid ADNANI, agrégé de mathématiques, doctorant en anthropologie au LAS Collège de France /France.
  • Hacène HIRECHE, universitaire, écrivain / France.
  • Rahma Houzig, militante associative, ex-présidente de Tamaynut-France /France.
  • Ahmed AIT BACHIR, nouvelliste de langue kabyle, militant politique/France.
  • Hocine REDJALA, réalisateur, journaliste militant / France.
  • Youcef ZIREM, écrivain /France.
  • Hamid Arab, directeur du site d’information « Le Matin d’Algérie » /France
  • Akli Mellouli, militant syndical et militant politique.
  • Massensen CHERBI, enseignant en droit et avocat /France.
  • Youcef REZZOUG, journaliste /France.
  • Odette ROLLAND, compagne du regretté Djafer Chibani (conteur et comédien) /France.
  • Tassadit BAOUZ, ex-membre de la Fédération de France /France.
  • Fatiha BENABDELOUHAB, Présidente de l’association Femmes Pluri-Elles, France.
  • Muhand Ouramdane KHACER, militant Amazigh, fondateur de l’Académie Berbère de Roubaix (1971/75), président de l’association « Afus Deg Wfus », France.
  • Sélim Ben ABDESSELEM, consultant juridique et politique, France.
  • Omar HAMOURIT, historien /France. 
  • Hamid SELMI, ethnopsychiatre /France.
  • Ferhat IGUERCHA, chanteur.
  • Kamel Lakhdar CHAOUCHE, journaliste, écrivain /France.
  • Ali CHIBANI, écrivain /France.
  • Kamel MEKTFI, militant politique /Canada.
  • Sanhadja AKROUF, militante féministe /France.
  • Hassene KEMEL, militant à la ligue française des droits de l’homme/ France.
  • Soad BABA AISSA militante féministe /France.
  • Fatiha RAHMOUNI, avocate /France
  • Ghanima AMMOUR, poétesse /France.
  • Assia BAKIR, chercheuse en anthropologie sociale /France.
  • Khaled BENYOUCEF, médecin retraité /France.
  • Amara BENAMARA, militant /France.
  • Akli D, artiste chanteur /France.
  • Chafia OUTERBAH, militante /France.
  • Azwaw CHEMROUK, militant des droits humains /France.
  • Mokrane ASSAM, militant démocrate /France.
  • Mohand BAKIR, militant /France.
  • Hand DJAOUK, militant /France.
  • Belaid DJAMER militant politique /France.
  • Sidi Menad SI AHMED, climatologue ONU /Vienne-Autriche.
  • Nourredine RAMI, militant amazigh /Canada.
  • Toufik BOURAS, activiste mozabite des droits humains /Belgique. 
  • Hammou CHECABCAB, activiste mozabite des droits humains et défenseur de la cause amazighe /Espagne. 
  • Idir CHALI, président de l’association de village Bouatba (Souamaa) /France.
  • Nacer HADDAD, juriste.
  • Jamal HAMID, artiste rifain /Pays-Bas
  • Youcef RECHOUM, activiste mozabite des droits des Amazighes / Belgique.

LISTE DES PREMIÈRES ASSOCIATIONS SIGNATAIRES :

  • Comité de coordination des peuples autochtones d’Afrique (PACC).
  • Fédération des Tunisiens pour une Citoyenneté des deux Rives (FTCR) /France
  • Association des femmes amazighes pour la Culture et le développement « Tamettut » Barcelona /Espagne.
  • Tamaynut-France, Clichy /France.
  • ABRID Amazigh (Association Berbère pour le Rayonnement Identitaire de Diaspora Amazighe), Montpellier /France
  • ACB-PARIS (Association de Culture Berbère-Paris) /France.
  • Tiwizi-59, association des Amazighs du Maroc à Lille /France.
  • Association Numidya /France.
  • Assemblée Mondiale Amazighe (AMA), Bruxelles /Belgique.
  • Organisation de la Diaspora Touarègue en Europe (ODTE).
  • Association franco-berbère de Villejuif /France
  • Association des Kabyles d’Ailleurs et d’Ici « AKAI » /France
  • Coordination Akal (contre la spoliation des terres et des richesses des populations Amazighs au Maroc) /Canada.
  • Survie touarègue-TEMOUST, Lyon /France.
  • Association Franco-Amazighe, Mulhouse /France.
  • Association des Étudiants Nord-Africains (ENAF) /France.
  • Amud Amazigh, association mémoire unité et diversités amazighes, Avignon, France
  • Actions-Détenus /France.
  • Association Atout-Keur (Kabylie-Europe), Paris /France
  • Comité de Soutien au Mouvement Rifain-Paris (CSMR-Paris) /France.
  • Association Rifrance pour le Développement Humains (ARIFDH), Montreuil /France.
  • Association Arif e.V /Allemagne.
  • Maison Amazighe – Huis van Amazigh Bruxelles /Belgique.
  • Association Franco-Berbère des Portes de l’Essonne /France.
  • Coordination Akal (contre la spoliation des terres et des richesses des populations Amazighs au Maroc (Chleuhs)) /USA.
  • Associazione culturale Berbera /Italie.
  • Association des Amis de l’Académie Berbère, Paris /France.
  • Association Femmes Pluri-Elles, Entraide et Solidarité, Boulogne-Billancourt.
  • Imdoukal N ait Souss /Belgique.
  • Thadath n Arif, Bruxelles /Belgique.
  • Collectif des Rifains d’Europe issu de l’initiative de Wuppertal (Europe).
  • Comité Moulay Mohand /Pays-Bas.
  • Association franco-berbère AZUL FELLAWEN (organisatrice de Miss Amazighe France), Vigneux-Sur-Seine /France.
  • Asociación Espacio de la Solidaridad, Madrid, Espagne.
  • Espace Culturel Berbère Européen Afus Deg Wfus /France.
  • Association Franco-Kabyle d’Alfortville AFKA /France.
  • Association « ACD » Art culture et Diversités Aubervilliers /France.
  • Asociación Thwiza Madrid /Espagne
  • Association Agraw, Lille, France.
  • AMUD Amazigh (association mémoires unité et diversités amazighes) Avignon /France.

Liste des initiateurs (Ordre alphabétique) :

  • Sonia ABES, militante des droits humains /France.
  • Alhassane AG SOLIMANE, enseignant de touareg à l’Inalco, membre du bureau de l’ODTE (Organisation de la Diaspora Touarègue en Europe) /France.
  • Hassan ASELOUANI, fonctionnaire, militant amazigh de Lille, président de l’association Tiwizi59 /France.
  • Ahmed ATAHRAN, militant associatif, membre du bureau l’Association Rifrance pour le Développement humain (ARIFDH) /France.
  • Imad ATTAHIRI, militant associatif, membre du bureau de l’Association Rifrance pour le Développement humain (ARIFDH) /France.
  • Abdoulahi ATTAYOUB, président de l’ODTE/TANAT, président de Survie touarègue-TEMOUST-Lyon /France.
  • Malika BARAKA, militante politique /France.
  • Nadia BATTOU, militante associative /France.
  • Chérif BENBOURICHE, ex-président de l’ACB-Paris /France.
  • Lyazid BENHAMI, président de l’Association franco-berbère de Villejuif /France.
  • Anaïs BOUDARENE, présidente de l’Association Franco-Berbère des Portes de l’Essonne /France.
  • Mehdi BSIKRI, écrivain.
  • Abdislem BOUMISSER, président de Tamaynut-France (Clichy) /France.
  • Lyes DJEBAILI, ingénieur économiste et militant politique /France.
  • Aissa DMAM, activiste Amazigh rifain, président de Maison Amazighe de Bruxelles /Belgique.
  • Brahim HAMDI, juriste tunisien, militant des droits humains /France.
  • Ilyas LAHOUAZI, militant politique /France.
  • Lila MANSOURI, militante politique et des droits humains /France.
  • Youcef MEDKOUR dit Youcef AMAZIGH, concepteur du drapeau amazigh /France.
  • Ouanis MENAOUEL, journaliste /France.
  • Nassim MESSAOUDI, militant pour les droits humains et la démocratie /France.
  • Soufiane MESTAOUI, militant associatif djerbien, éditeur (Éditions Ibadica) /France.
  • Rachid MOUMNI, militant des droits humains, Belgique/Norvège.
  • Ali NACIHIE, président de l’Association Rifrance pour le Développement Humains (ARIFDH) /France.
  • Karim OUACHEK, militant pour les droits humains et la démocratie /France.
  • Mohand OUALLI, président de l’Association des Kabyles d’Ailleurs et d’Ici /France.
  • Jamal OUASSOU, doctorant (INALCO) et président de « ABRID Amazigh » / France.
  • Rachid OUFKIR, militant politique rifain et des droits humains /France.
  • Mariam RALIOU, vice-présidente de l’ODTE/Tanat /France
  • Romar Rodríguez Martín, Îles Canaries, Espagne
  • Khodir SEKOUTI, militant des droits humains et des droits des Amazighs du Mzab, ex-détenu politique /Espagne.
  • Akli SH’KKA, auteur et journaliste touareg libyen, militant des droits humains /Royaume-Uni.
  • Abderrezak SLIMANI, militant associatif, membre de l’association ACB-Paris /France.
  • Hakim TAIBI, Groupe Action-détenus /France.
  • Belkacem TATEM, président de l’ACB-Paris /France.
  • Hamid U MELLAL, militant de la cause amazighe (Maroc central) /France.
  • Maya Mariama WALAT MOHAMMED, membre du bureau de l’ODTE /France.

Cet appel à une marche des diasporas amazighes à Paris est une initiative d’un groupe de militants de la cause berbère, venant de diverses régions amazighes, qui veulent célébrer le printemps berbère dans l’union et la fraternité, particulièrement dans ces moments difficiles et menaçants que traversent les peuples d’Afrique Nord et du Sahel.

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Culture

Note sur Mémoire algérienne* de Henri Alleg par Jeanne FOUET-FAUVERNIER**

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Note sur Mémoire algérienne* de Henri Alleg par Jeanne FOUET-FAUVERNIER**

Le titre de cet ouvrage indique un projet d’écriture : il s’agit bien d’UNE mémoire, et non pas de « Mémoires », ce genre littéraire qui suppose de traiter de l’Histoire par le biais de la vie personnelle de l’auteur. La nuance est d’importance : c’est d’abord de son propre parcours que s’occupe Henri Alleg, parcours qui le conduisit à passer une grande partie de sa vie en Algérie, à y faire de multiples rencontres, à y travailler, à s’y engager politiquement et humainement, à y souffrir tortures et incarcérations, puis à devoir faire face à la renonciation de certains de ses rêves.

Une intimité singulière

Dans ce texte, moins connu que La Question, l’auteur ne prétend donc pas faire œuvre d’historien, ne propose pas de bibliographie en fin de volume, utilise rarement des notes de bas de page. Il s’agit de raconter sa vie, tout simplement, et cette vie a été fortement impactée par les « événements », comme osaient alors le dire les différents gouvernements français confrontés à la lutte de l’Algérie pour obtenir son indépendance. De cette hypocrisie dans la dénomination d’une vraie guerre, Alleg montre d’ailleurs les effets pervers : puisqu’il n’y avait pas officiellement de guerre en cours, la mise en cause des pratiques de torture, « disparitions » de militants, destructions de villages et autres horreurs lui valurent…des procès en diffamation !

La vie d’Harry Salem s’apparente à un roman picaresque. Le héros y subit de multiples péripéties, les rebondissements s’enchaînent, une foule de personnages secondaires l’accompagne dans les soubresauts de la période historique où vit et œuvre. Il a aussi le bonheur de rencontrer une épouse merveilleuse, de devenir père de deux garçons qu’hélas il verra peu, de voyager beaucoup, d’être emprisonné, de s’évader, de parler autant avec des petits cireurs de chaussures qu’avec des ministres.

Il naquit en 1921 à Londres dans une famille juive peu pratiquante d’Europe de l’Est ayant fui les pogroms, installée plus tard à Paris et soucieuse de lui offrir la meilleure éducation possible. Le père était tailleur, et souhaitait que son fils fasse des études supérieures pour devenir pharmacien. Mais l’adolescent, avide de grands espaces et d’aventures que lui avaient révélées ses lectures, se refusait à tenir boutique, et quitta Paris pour Marseille puis Alger grâce aux faibles dépenses qu’impliquait le logement en Auberge de Jeunesse.

Passion algérienne

Débarqué à Alger en 1939, ébloui par la beauté de la ville, fasciné par le monde des jeunes « ajistes », il ne savait pas encore que l’Algérie assurerait le cadre de ses engagements les plus fervents et de ses interrogations les plus passionnées sur ce qu’il adviendrait des rapports entre une idéologie communiste à laquelle il resta toujours fidèle, et la revendication nationaliste des partisans de l’Indépendance.

Très tôt, la condition misérable des Algériens colonisés l’indigne. Jeune militant communiste et adhérant au projet indépendantiste, il est allé visiter le pays auquel la grande ville blanche tourne le dos. Tel Albert Camus « qui, encore journaliste d’Alger républicain, découvrait avec effarement que cinquante pour cent au moins de la population se nourrissaient d’herbes et de racines » (page 112), il accumule les témoignages de visu lors de ses tournées politiques. Le spectacle de malheureux démunis de tout et parqués hors les murs des villes lui soulève le cœur. La scolarisation des enfants algériens, pourtant nés dans un département français, donc relevant de l’instruction publique, laïque, et obligatoire, reste inexistante dans les villages et très marginale en milieu urbain. La composition des deux collèges électoraux, qui prétend mettre « à égalité » de représentation citoyenne la population coloniale restreinte et la population indigène immensément majoritaire, lui paraît un déni de démocratie. Les profiteurs de guerre, les gros colons, les personnels politiques métropolitains adeptes d’un « maintien de l’ordre » qui suppose de tirer sur les foules et de créer des espaces carcéraux indignes, toute la violence d’une domination ensauvagée, le révulsent. Alleg est un militant, et avant tout un homme en colère devant l’injustice, qui espère participer à la libération d’un peuple dont il se sent faire partie. Il s’adonne à cette mission dans des conditions souvent douloureuses, entre dans la clandestinité et change de nom pour devenir Henri Alleg. Il se bat contre une censure infâme pour faire paraître le journal dont il est devenu directeur de rédaction, échappe à plusieurs attentats, vit caché parfois, séparé longtemps de son épouse et de ses enfants. C’est un combattant intellectuel persuadé que l’écriture d’articles aidera à faire jaillir la vérité de l’oppression. C’est aussi, à sa façon, un croyant en l’amélioration de l’humanité, porté par une idéologie communiste sans faille. La réalité de l’Union Soviétique lui demeure étrangère, les atermoiements du Parti Communiste Français de l’époque, ou les divergences entre chefs de partis algériens, trouvent toujours en lui une explication rassurante.

Nationalité provisoire

La conclusion de ce grand amour avec l’Algérie est cependant amère. Le coup d’État de 1965 s’accompagne du retour à un régime policier. Les supplices reprennent du poil de la bête, alors que « L’Algérie indépendante avait été fière d’avoir été le premier pays à condamner officiellement la torture et à inscrire son interdiction dans sa Constitution » (page 336). La censure des journaux s’installe. Le syndicalisme indépendant est muselé. Une interprétation « panarabiste » de ce qu’est le peuple algérien en exclut de fait les Berbères et les Juifs. L’Islam est proclamé religion d’État. La participation des femmes à la vie publique est considérée comme indécente. Quant au Parti Communiste Algérien, il fut interdit dès 1962, car un seul parti et un seul, le FLN, devait diriger le nouveau pays.

Anecdote consternante et révélatrice de la grande désillusion : Alleg et son épouse Gilberte ont obtenu la nationalité algérienne en quelque sorte par dérogation et pour services rendus, alors que les nouvelles conditions d’obtention de la nationalité algérienne exigent du candidat d’être musulman. Mais lors de l’établissement des papiers d’identité et de passeports pour leurs deux fils mineurs, les époux apprennent que leur nationalité algérienne ne se transmet pas à leurs enfants ! Le nouveau régime algérien a inventé la nationalité provisoire, dont le bénéfice s’éteint avec la mort du citoyen… Les Alleg retournent en France, après avoir en outre bien compris que les nouveaux maîtres s’avèrent plus soucieux de leurs intérêts personnels que de l’intérêt général.

Henri Alleg est mort en 2013. A plus de quatre-vingts ans, il était retourné en Algérie avec son épouse. En 2002, le pays s’extrayait péniblement d’une décennie de cauchemar intégriste ayant causé des dizaines de milliers de victimes. Les deux vieillards parcoururent les chemins de leur jeunesse avec au cœur la même foi en des lendemains radieux, ou plutôt des après-demain, car le terme du parcours inachevé « se révélait seulement plus lointain, plus douloureux et plus difficile à atteindre que nous ne l’avions cru » (page 408). Belle leçon de persévérance.

*Paris : Stock, 2005

** Professeur agrégée de Lettres retraitée

Docteur ès-Lettres, spécialiste en littérature francophone maghrébine

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Culture

39e édition du Festival international Vues d’Afrique

Zoom sur le cinéma africain

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39e édition du Festival international Vues d’Afrique

Le cinéma algérien sera le grand absent du Festival international de cinéma Vues d’Afrique dont la 39e édition aura lieu du 20 au 30 avril à Montréal. À part « Houria » de la cinéaste Mounia Meddour qui participe à la section internationale fiction longs métrages, on ne retrouve plus les classiques algériens, dont certains ont été primés aux éditions antérieures du FICVA. 

Houria est une femme de ménage qui, la nuit venue, s’improvise danseuse aux talents avérés. Mais par un soir où elle a gagné gros, l’artiste a été violemment agressée avant de se retrouver alitée à l’hôpital. Ce qui met fin à ses espoirs d’une carrière de ballerine, maintenant que son corps est passablement est amoché. La mort dans l’âme, elle se fait entourer de femmes pour tenter de trouver un sens à sa vie en faisant de la danse un moyen de sublimation des corps blessés.

Sorti en 2021, le long métrage de M. Meddour tentera d’avoir les faveurs du jury qui aura à trancher parmi une douzaine de longs métrages et une vingtaine de moyens et courts métrages dans la sélection internationale des films de fiction.

Si le 7e art algérien est pratiquement absent au rendez-vous, le cinéma nord-africain est relativement bien représenté avec des productions marocaines et tunisiennes. Dans la programmation dévoilée en conférence de presse mardi, on retrouve « Djbel Moussa » du Marocain Driss Mrini, une adaptation d’une œuvre de Abderrahim Bahir, et une fiction tunisienne de Youssef Chebbi, « Ashkal », un polar fascinant qui entretient une tension permanente restituée par des images fortes.

Seront également dans la compétition trois courts métrages marocains, un court métrage et deux documentaires tunisiens, alors que l’Algérien Rachid Allaoua participe avec son court métrage « Yanni » dans la section Regards d’ici.

Au total 109 films en provenance de 39 pays seront en compétition lors de ce rendez-vous cinématographique qui sera inauguré par une première canadienne du film « Hommage d’une fille à son père » de la cinéaste malienne Fatou Cissé.

Cette année le festival sera ponctué par l’organisation d’un colloque international qui abordera la thématique des traumatismes et le cinéma avec la participation de critiques, cinéastes, experts et universitaires. Le colloque qui se tiendra du 26 au 28 avril au Centre culturel marocain de Montréal propose une réflexion sur la fragilité écologique du monde, la marginalisation des populations vulnérables, la recherche sur de nouvelles formes et expressions dans le cinéma africain.

Cette édition de Vues d’Afrique, présentée par le groupe médiatique Québecor, aura comme marraine Halima Gadji, une actrice de mère maroco-algérienne et de père sénégalais, et comme parrain le plasticien Stanley Février.

De Montréal : Younes Lamri

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Culture

Maroc : les dessous de l’immolation par le feu d’un artiste

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Maroc : les dessous de l’immolation par le feu d’un artiste

En sit-in devant le ministère de la Culture à Rabat, le dramaturge Ahmed Jaouad s’est malheureusement immolé par le feu. Secouru de justesse, l’homme de théatre proteste contre sa marginalisation par le ministère.

Lundi, vers 10h de la matinée au centre-ville de Rabat. Les passants près du Théâtre Mohammed V sont stupéfaits de voir un individu s’immoler par le feu devant le siège du ministère de la Culture. Une petite poignée de personnes se précipitent alors sur la personne avant que les agents de sécurité n’utilisent des extincteurs pour sauver la vie de l’homme, dont le corps est en partie calciné. Il sera rapidement transféré aux urgences.

Dès lors, les suppositions se multiplient au sujet du fâcheux drame de ce début de semaine. De qui s’agit-il ? Selon les premiers témoins qui ont appelé les services de secours et échangé avec les agents de sécurité du siège du ministère de la Culture, il s’agit d’Ahmed Jaouad, artiste et dramaturge connu. Natif d’El Jadida, il mène un bras-de-fer contre ledit ministère.

L’homme de théâtre aurait également laissé une lettre manuscrite pour expliquer les raisons de son acte, selon les premiers témoins.

Réaction institutionnelle

Quelques heures après ce drame, le ministère de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication se fond d’un communiqué express où il annonce avoir pris acte du malheureux « incident » survenu le matin même devant la porte principale de son siége à Rabat. La déclaration confirme bien qu’il s’agit du dramaturge Ahmed Jaouad. Le ministère a exprimé dans sa communiqué ses « profonds regrets pour ce tragique incident », souhaitant un prompt rétablissement à l’artiste transféré au CHU Ibn Sina de Rabat pour recevoir des soins. Le département gouvernemental a également exprimé sa pleine solidarité avec le citoyen et sa famille, à la suite de ce qui s’est passé, « quels que soient les circonstances, les antécédents et les motifs à l’origine de l’incident », note le communiqué.

En guise de mise au point, le ministère a indiqué que « l’affaire concerne un contractuel du théâtre Mohammed V de Rabat, qui a pris sa retraite en octobre 2021 ». L’intéressé « jouit de tous ses droits qui lui sont garantis par la loi », et « travaille en parallèle dans théâtre », selon le ministère qui déclare au passage qu’Ahmed Jaouad « avait précédemment soumis une demande d’achat de représentations théâtrales, qui a été approuvée, car ce ministère a acheté deux représentations théâtrales en 2022 », et « a accepté d’acheter une représentation théâtrale en 2023, auparavant présentées dans les villes de Salé et de Mechra Bel Ksiri. » Et de prévenir que le ministère suit l’état du dramaturge, « moment par moment ». Un responsable du secteur de la Culture a été dépêché pour surveiller sa santé à l’hôpital,- et lui souhaiter un prompt rétablissement, ajoute-t-on.

Très modeste retraite

Contactée par ADN Med, une source syndicale proche d’Ahmed Jaouad relève que l’artiste « avait été empêché, la semaine dernière, d’entrer au ministère de la Culture ».

On apprend qu’en chaque début de semaine, Ahmed Jaouad a malencontreusement pris pour habitude d’observer un sit-in devant la porte principale du siège du ministère pour réclamer ses droits dans le cadre d’un litige non résolu entre le dramaturge et le ministère.

Cette source nous rappelle que le dramaturge, à la retraite depuis 2021, a travaillé pendant des années comme responsable du « Club de la famille » au Théâtre Mohammed V de Rabat. « Sa très maigre pension de fonctionnaire d’échelle 6 n’est aucunement suffisante pour subvenir aux besoins de sa famille, malgré tout ce qu’il a donné dans ce domaine de création », dévoile cette source proche. Ahmed Jaouad a multiplié ces deux dernières années les appels pour obtenir les soutiens adéquats, visiblement sans succès. Depuis, il se plaint de ne pas avoir été promu pour des raisons administratives,

Dans la matinée du lundi 27 mars, jour de la malheurese tragédie, le dramaturge qui venait pour son sit-in hebdomadaire « a été surpris par la venue d’un fonctionnaire du ministère qui occupe le poste de chef du service de l’Equipement et qui a contacté les forces de l’ordre qui sont alors intervenues en voiture des services sociaux qui transportent normalement les personnes abandonnées et sans-abri ».

Notre source syndicale proche du dramaturge indique qu’Ahmed Jaouad a refusé dans un premier temps d’accompagner les autorités dépêchées sur place, après avoir remis sa carte d’identité et sa carte professionnelle d’artiste. « Il a très poliment expliqué qu’il préférait être embarqué dans une voiture de police et non pas de ramassage de personnes sans domicile fixe », nous rapporte cette source, précisant que les agents d’autorité « ont compris à ce moment-là que le fonctionnaire leur avait menti sur la vraie identité de la personne dénoncée ».

C’est à ce moment, selon notre interlocuteur, qu’une fonctionnaire du ministère, qui est également syndicaliste, a prié Ahmed Jaouad de mettre fin au sit-in. Au cours de cet échange avec ladite fonctionnaire, Ahmed Jaouad aurait menacé de se brûler, « si le ministère poursuit son entêtement et refus de répondre à ses réclamations légitimes », poursuit notre source. Des menaces que le dramaturge a malheureusement mis en exécution durant cette matinée du lundi 27 mars.

J.A.

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Culture

Diaspora. Un 8 Mars honoré par Ali Amrane à Poissy

Un kabyle de plus qui illumine les salles parisiennes

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Diaspora. Un 8 Mars honoré par Ali Amrane à Poissy

A l’occasion de la journée internationale des droits de la femme, le célèbre chanteur algérien d’expression kabyle Ali Amrane – un virtuose de la mélodie et de l’arpège dont la modernité n’altère en rien l’authenticité du chant –, a illuminé samedi dernier, la salle du Forum Armand Peugeot à Poissy, région parisienne.. 

Avant-première : 

Invitées à se produire, les deux étoiles montantes de la chanson kabyle, en l’occurrence Yasmine TALEB et Lycia NABETH, ont brillamment assumé leur rôle de relève en émerveillant le public par leurs voix puissantes et mélodieuses et la maitrise de leur langue maternelle.

Un show mémorable :

La star de la soirée a fait son apparition devant un public manifestant un enthousiame débordant. Il a commencé par interpréter une des chansons de son album réalisé avec le grand Idir en 2018, « ahlil a win ihana w-ulis » avant de poursuivre avec plusieurs titres qui rendent hommage à la femme, notamment « Huriya », « bƔiƔ a-kem hemmala Ɣ» et « anef-as i tuzyint ».

Dans une ambiancefrisant l’ euphorie, les spectateurs, majoritairement, jeunes chantaient avec Ali Amrane les plus belles chansons de sa carrière avant de finir sur son titre fétiche « Tabalizt ».  

Surprise de la soirée  Ce concert dédié aux droits des citoyennes a connu la présence d’Anissa BELAKASSEM et Sekoura HANNAD, respectivement 1ere et 4éme dauphine de « Miss Amazigh de France 2023 » qui ont tenu à monter sur scène pour exprimer leur hommage à la femme berbère. 

Hommage au grand IDIR

Les animateurs de la soirée n’ont pas manqué de rendre hommage à la légende de la chanson kabyle Idir en interprétant ses standards comme « azwaw » ou « avrib », un moment émouvant, applaudi par le public qui a apprécié l’initiative de perpétuer la mémoire de l’artiste disparu en 2020..

Ali Amrane partage avec Idir ce don de transmettre l’âme de la poésie et de la musique amazighes sur des supports modernes qui projettent avec bonheur cette culture dans l’universalité : un talent rare.

S.K

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