ALGÉRIE : LE POUVOIR VEUT RÉGENTER LA PRESSE.
C’est le chef de l’État en personne qui a ordonné la création d’un Conseil supérieur de l’éthique et de la déontologie du journalisme lors de la réunion du conseil des ministres tenue ce dimanche. Selon une dépêche de l’APS qui rapporte l’information, ce conseil a pour prérogatives « de statuer sur les questions à caractère professionnel dans toutes les spécialités médiatiques ».
Dans les pays où il existe, ce genre d’organisme est généralement créé par les professionnels du secteur. La mise sous tutelle de l’administration de la vie intellectuelle et morale des médias vient en soutien d’un dispositif financier qui met les journaux sous la dépendance de l’Agence nationale d’édition et de publicité, l’ANEP, laquelle distribue les annonces en fonction du degré d’allégeance qu’affichent les journaux envers le pouvoir. Dans les cercles journalistiques, la création de ce « Conseil supérieur » fait craindre des contraintes supplémentaires pour le journaliste dans une phase politique qui a vu des titres emblématiques de la presse indépendante comme le quotidien Liberté disparaitre pendant que d’autres, à l’instar du journal El Watan, naguère journal de référence, survivent dans des conditions de grande précarité.
Lors du même conseil des ministres, Abdelmadjid Tebboune a instruit les services concernés par le dossier pour « domicilier les chaines de télévision à contenu algérien avant la fin de l’année en cours, et ce, en coordination avec l’entreprise de télédiffusion d’Algérie, afin de lutter contre le transfert illicite de devises de manière déguisée ». Les créations de ces chaines domiciliées à l’étranger furent encouragées par Abdelaziz Bouteflika. « Elles sont tolérées » répondait le ministère de l’information à chaque fois qu’il était interpellé sur ce privilège qui ne reposait sur aucune base légale, l’Algérie n’ayant pas ouvert à la concurrence le secteur de l’audio-visuel.
Appelées par les Algériens « chaînes Zigou » (chaînes des égouts) ces télévisions, à la ligne éditoriale généralement acquise à l’islamo-conservatisme avaient pour mission de s’en prendre aux personnalités ou organisations opposées au régime dans des termes que la télévision d’État ne pouvait pas endosser.