Tebboune au secours de Kaies Saied
Confrontée à une crise économique et financière sans précédent et isolée sur la scène internationale, la Tunisie espère pouvoir compter sur l’Algérie dont elle a épousé les causes et les engagements depuis un peu plus de deux ans. Selon le quotidien algérien El Watan, Abdelmadjid Tebboune serait sur le point de lancer une opération qui proposerait de réunir un groupe de donateurs arabes pour prévenir la faillite qui menace son voisin de l’est.
Inquiétude unanime
L’urgence est telle que l’initiative devrait être annoncée pendant ce mois de ramadhan.
Ces derniers jours, les observateurs et les partenaires de la Tunisie expriment les uns après les autres leurs plus profondes préoccupations. Après Josepp Borrell, responsable de diplomatie européenne qui a appelé le 20 mars, en des termes directs, les autorités tunisiennes à l’impérieuse nécessité de trouver un accord avec le FMI, c’est la présidente du Conseil italien, Giorgia Meloni, qui avouait le 22 mars dans des termes à peine voilés devant le parlement son inquiétude quant à la possibilité de contribuer à débloquer le prêt attendu par la Tunisie du FMI. Le même jour, le secrétaire d’État américain, Anthony Blinken ne disait pas autre chose devant le Sénat américain à propos de l’accord que doit conclure Tunis avec l’institution financière internationale : « Nous les encourageons ( les Tunisiens NDLR ) fortement à le faire parce que le risque est que l’économique s’effondre ». Antony Blinken a même envoyé le 23 mars à Tunis, Barbara Leaf, sa sous-secrétaire d’État pour les Affaires du Proche-Orient avec l’espoir de persuader le président d’entamer les réformes qu’appelle la situation. En vain ; puisque Kaies Saied ne recevra pas la dirigeante US alors qu’il y a quelques mois il s’était entretenu avec elle mais pour lui dire que la Tunisie n’accepterait aucune ingérence dans ses affaires intérieures.
Le 24 mars, c’est à dire le lendemain du voyage de la sous-secrétaire d’Etat américaine, c’est le président français qui alertait à Bruxelles en marge du sommet européen sur le fait que : « la très grande tension politique, la crise économique et sociale qui sévit en l’absence d’accord avec le Fonds monétaire international, est très préoccupante ».
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Alger, soutien ou boulet ?
Autant de signaux qui laissent de marbre Kaïs Saïed
Exception qui confirme la règle dans cette pluie d’avertissements : le locataire de Carthage qui est toujours obsédé par le complot qui viserait son pouvoir, un instrument dont il s’est persuadé qu’il va défaire les ennemis du peuple et démasquer les traitres à la nation. Une interprétation qu’Alger l’encourage à entretenir et développer. En effet, le…. Abdelmadjod Tebboune déclarait qu’il ne « lâcherait pas la Tunisie qui fait face à un complot » ( voir adn-med du 24/03/2023 ).
Les pistes que le régime algérien cherche à ouvrir à son protégé s’avèrent étroites.
Destinée à mobiliser la solidarité parmi les rangs arabes afin de contourner les solutions préconisées par les partenaires occidentaux de la Tunisie, l’initiative d’Abdelmadjid Tebboune risque d’être contre-productive. D’une part, les pays arabes n’adoptent pas tous le même positionnement par rapport à la crise ukrainienne dans laquelle Alger a pris fait et cause pour Moscou ; d’autres parts, le Maroc qui n’a que très modérément apprécié l’alignement de Tunis sur la position algérienne dans la question du Sahara occidental – et c’est là un euphémisme -dispose d’un réseau aussi sinon plus dense que l’Algérie à la Ligue arabe. Le nombre de défections que Tebboune a essuyées au sommet arabe d’Alger en novembre 2022,malgré l’entregent du très entreprenant Lamamra, est là pour illustrer le poids de la diplomatie chérifienne au Proche et au Moyen Orient. Enfin et surtout, la plus grande partie des relations économiques, financières et militaires de la Tunisie dépendent des capitales occidentales avec lesquelles elle a construit l’essentiel de ses partenariats depuis son indépendance.
Porte d’entrée de l’immigration clandestine vers l’Europe du sud, espace de pédagogie démocratique dans le monde musulman désormais livrée au sectarisme panarabiste d’un chef d’Etat imprévisible, la Tunisie vit les heures les plus incertaines de son histoire contemporaine.