Minerais stratégiques et critiques : le CESE veut renforcer la souveraineté industrielle du Maroc
Le Conseil Économique Social et Environnemental, CESE, a rendu public ce mercredi 29 mars 2023 son avis portant sur « Les minerais stratégiques et critiques contributeurs à la souveraineté industrielle du Maroc ».
Intervenant à cette occasion à Rabat, le président de l’institution, Ahmed Réda Chami, a souligné que « le fait d’aborder ce sujet intervient au regard de l’importance critique que présentent les minerais stratégiques et critiques dans la promotion de la souveraineté industrielle et la réalisation du développement, et au vu du contexte international marqué par une forte demande de ces minerais ».
Dans ce sens, le CESE propose plusieurs recommandations à même de contribuer à la réalisation des ambitions nationales affichées en matière de transition énergétique, d’industrialisation, de numérisation ainsi que dans d’autres projets stratégiques pour la transition vers un nouveau modèle de développement.
Dépendance globale
Présentant les conclusions de l’avis objet de cette rencontre, le rapporteur du thème et membre du CESE, Abdallah Mouttaqi, a indiqué que cette étude « traite, dans une perspective prospective, du système des minerais stratégiques et critiques et de son impact sur le processus d’industrialisation et sur la dynamique de développement au Maroc ».
Dans son avis d’une cinquantaine de pages, le CESE révèle un certain nombre d’obstacles entravant le développement d’un écosystème des minerais stratégiques et critiques, en particulier en matière d’importation et de valorisation.
Il s’agit en premier lieu de l’existence d’un modèle « essentiellement tourné vers l’export de concentrés et de produits bruts (hors phosphates et cobalt principalement) avec une faible synergie avec le secteur industriel ». L’avis signale ensuite une « forte dépendance aux importations pour la plupart des minerais », et une « concentration géographique des fournisseurs pour de nombreux minerais critiques notamment dans des pays connaissant des revirements politiques et géostratégiques ».
La liste des 24
Autre écueil au développement du secteur, « la faible part du recyclage et de la valorisation des déchets dans les secteurs minier et industriel », mais aussi des obstacles à caractère transverse à l’ensemble du secteur. Exemple, « la taille (moyenne et petite) des gisements à l’exception des phosphates, l’absence d’incitations fiscales spécifiques aux activités minières, la lourdeur et la complexité des procédures de gestion du patrimoine minier, ainsi que les difficultés liées à l’accès à un financement adapté notamment pour TPE et les PME opérant dans le secteur minier (sociétés juniors) », note le CESE.
Dernière observation sur les contraintes au développement recherché, « la non publication, de la part des autorités publiques, d’une liste officielle des minerais stratégiques et critiques pour notre pays », regrette le CESE.
Partant du diagnostic réalisé, le Conseil présidé par M. Chami propose une liste exploratoire (également appelée liste 1.0).
Cette liste comprend 24 minerais stratégiques et critiques pour le Maroc, « tenant en compte la conjoncture nationale, les capacités minières ainsi que les orientations et choix sectoriels qui seront faits par notre pays notamment dans le cadre du nouveau modèle de développement », justifie les auteurs de l’étude.
Feuille de route
Le CESE formule dans ce contexte un ensemble de recommandations permettant de relever cinq défis majeurs. Il s’agit, de prime abord, d’« encourager l’exploration minière ». Il est question ensuite de « sécuriser et diversifier les sources d’importation des minerais stratégiques et critiques et constituer des stocks stratégiques de sécurité minière en vue de répondre aux besoins de développement et de souveraineté », préconise l’avis.
Autre bonne pratique souhaitée : « renforcer la valorisation nationale de ces minerais à travers l’institutionnalisation systématique de la coordination et des synergies entre les acteurs du secteur minier et du secteur industriel ». Cette dernière recommandation reste tributaire de la mise en place des « mécanismes de financement et des incitations fiscales adaptés pour assurer un meilleur positionnement du Maroc dans les chaînes de valeur mondiales y afférentes ».
Pour contourner un autre maillon faible relevé par l’avis, les auteurs du rapports invitent à « encourager la recherche et développement ainsi que les activités industrielles relatives au recyclage et la recherche d’alternatives aux minerais stratégiques, notamment à travers l’industrialisation de matériaux innovants », recommande le CESE qui insiste en fin sur le « respect des engagements sociaux et environnementaux » et « l’inclusion la population dans les projets d’exploitation minière ».
J.A.