Le leader d’Ennahdha Sahbi Atig comparaît après 29 jours de grève de la faim
Sahbi Atig, ancien député et cadre du mouvement islamiste Ennahdha, a fait face au juge d’instruction du Tribunal de première instance de l’Ariana, en banlieue de Tunis, le vendredi 9 juin, après avoir entamé une grève de la faim depuis 29 jours. En raison de sa santé préoccupante et à peine conscient, il n’a cependant pas pu être interrogé. Son avocat, Samir Dilou, a également déclaré que son client pouvait à peine marcher, nécessitant le soutien de plusieurs agents pour se déplacer. Après cette comparution, Sahbi Atig a été reconduit à la prison de Mornaguia, près de Tunis, où il est détenu depuis le 12 mai dernier.
Arrêté le 6 mai, Sahbi Atig a entamé une grève de la faim « sauvage » (se limitant à boire de l’eau) après que le juge d’instruction a émis un mandat de dépôt à son encontre. Il est accusé de corruption et de blanchiment d’argent par un jeune homme ayant des antécédents judiciaires. Malgré la détérioration état de santé, qui a nécessité plusieurs hospitalisations, Sahbi Atig a poursuivi sa grève pour dénoncer « des déclarations mensongères qui touchent à son honneur », selon sa femme Zeineb Mraïhi qui a décrit un homme très affaibli et amaigri. « La dernière fois que je lui ai rendu visite, il s’était évanoui », a-t-elle déclaré.
L’affaire remonte à 2016, lorsqu’un adolescent a été arrêté après avoir volé une importante somme d’argent dans une maison située dans un quartier voisin de celui de Sahbi Atig. Relâché puis arrêté à nouveau en 2023 dans une autre affaire, le jeune homme a récemment témoigné que la maison cambriolée était en réalité celle de l’ancien député et que ce dernier lui avait rendu visite dans le centre de détention pour mineurs pour lui demander de garder le silence. Selon le dossier judiciaire, un responsable de la sécurité serait également impliqué dans ces malversations, mais le juge n’a vérifié aucune de ces allégations, selon le comité de défense du militant d’Ennahdha.
De nombreux opposants d’Ennahdha mais aussi d’autres formations politiques sont emprisonnés depuis plusieurs mois, après que le président tunisien Kaïs Saïed, qui s’est arrogé les pleins pouvoirs le 25 juillet 2021, a lancé une offensive judiciaire à leur encontre, les accusant, pour la grande majorité, de complot contre la sûreté de l’État. Des juges, des syndicalistes et d’anciens hauts responsables sécuritaires se trouvent également derrière les barreaux pour diverses accusations. Le président du parti Ennahdha, Rached Ghannouchi, a lui-même été arrêté le 24 avril 2023 et placé en détention. Dès le lendemain de son arrestation, les locaux de son parti ainsi que ceux du Front du salut national, principale coalition d’opposition au régime de Kaïs Saïed, ont été fermés sur l’ensemble du territoire tunisien.