jeudi, novembre 30, 2023
Économie

Algérie. Pourquoi l’accélération de l’exploitation de Gara Djebilet ?

Ce samedi, un accord de partenariat a été signé, à Tindouf, entre l’Entreprise Nationale de Fer et d’Acier (FERAAL) et le consortium chinois (CMH) pour l’exploitation des minerais de fer de Gara Djebilet-Ouest et sa valorisation par la construction d’une usine de production de plaques d’acier à Bechar. Une ligne de chemin de fer reliant Tindouf à cette ville accompagne le méga-projet dont le coût global n’est toujours pas estimé de façon définitive ; le chantier devant être développé en plusieurs phases qui se répartissent sur une vingtaine d’années.

Une précipitation qui surprend

Découvert au début des années cinquante, le gisement de minerai de fer de Gara Djebilet, situé dans la wilaya de Tindouf ( grand sud-ouest algérien ) fut longtemps considéré par les pouvoirs publics comme un site d’exploitation complexe et peu rentable s’il fallait en assurer le traitement et l’exportation à partir des grandes villes portuaires du nord comme Oran. ( Voir dossier d’adn-med du 25/04/2023).

Annoncées par Abdelmadjid Tebboune au mois de mai 2021 à l’issue d’un conseil des ministres, les premières opérations d’exploitation de la mine ont commencé moins de trois plus tard.

Depuis une année les autorités algériennes ont décidé d’accélérer encore plus le rythme des travaux sur ce site. Mieux, la volonté de créer une grande zone industrielle destinée à extraire et traiter le minerai sur place a surpris observateurs et experts.

Les information recueillies à l’occasion de la  cérémonie de signature de ce samedi, annoncent à partir de 2026 une production de 2 millions de tonnes de minerai de fer par an pour  la mine de Gara Djebilet-Ouest. Un volume qui sera porté à 50 millions de tonnes à partir de 2040.

Pour le PDG du groupe public Manadjim El Djazair “MANAL”, Mohamed Sakhr Harami présent lors de la signature du protocole algéro-chinois, ce projet intégré  “s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie adoptée par le ministère de l’Energie visant la concrétisation de la feuille de route du Gouvernement en termes de valorisation des ressources minières et la réalisation des mégaprojets“. Il précise que ” Le projet de valorisation de la mine Gara-Djebilet permettra dans ses premières phases d’assurer la matière première pour toute l’industrie sidérurgique en Algérie qui nécessite des quantités considérables” avant d’ajouter que l’année dernière l’Algérie avait importé 1,2 milliards de dollars de matières premières. Il assure, par ailleurs, que les premiers investissements qui seront parachevés en 2025 rapporteront l’équivalent de  2 milliards de dollars.

Enjeux économiques et défis territoriaux

Ces explications ne font pas tarir les spéculations soulevées par le soudain intérêt du pouvoir algérien pour l’exploitation d’un gisement dont les études géologiques, techniques et économiques avaient relevé une rentabilité que rien ne pouvait garantir en l’état actuel des connaissances, notamment  s’agissant des méthodes de séparation du phosphore dont le minerai de Gara Djebilet a une teneur dépassant largement les normes d’exploitation admises ordinairement.

Plusieurs sources proches du dossier estiment que les raisons qui ont déterminé la précipitation d’Alger à engager un processus industriel financièrement couteux renvoient  essentiellement à des considérations d’ordre territorial et sécuritaire.

Les déclarations de certains organes de presse marocains qui mènent campagne pour la remise en cause des frontières héritées de la décolonisation et la soudaine détérioration des relations algéro-marocaines ont poussé le régime algérien à investir massivement pour saturer humainement et militairement des territoires dont les populations, longtemps oubliées du développement national, cultivent une certaine rancœur à l’endroit du pouvoir central. Un ressentiment qui pourrait, redoute-t-on à Alger, prendre l’expression d’une défiance plus radicale si des conjonctures politiques venaient à tendre de nouveau la scène algérienne.

Pour cet ancien cadre de la SONAREM ( société nationale des recherches et d’exploitation minière), une entreprise publique qui avait pris le relais des investigations lancées à l’époque coloniale, «  au jour d ‘aujourd’hui, il n’y a pas d’arguments économiques convaincants pour se lancer dans de tels investissements. »

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