mardi, novembre 28, 2023
Politique

Maroc : soudaine effervescence politique

La scène politique marocaine s’emballe brusquement sur fond d’affrontement opposant Abdellah Benkirane, le parton du parti islamiste, le PJD et Abdelatif Ouahbi, ministre de la justice, également responsable du parti de l’authenticité et de la modernité, le PAM fondé par Fouad Ali Himma, l’une des personnalités marocaines les plus proches de Mohamed VI. 

Animosités personnelles et antagonismes sociétaux

Les deux personnes d’origine amazighe ont longtemps épousé des causes antinomiques dans lesquelles elles se sont investies corps et âme. Si Benkirane est toujours fidèle aux thèses islamistes,  Ouahbi, a un parcours moins linéaire. Avocat extraverti, l’homme a fait ses classes dans le parti de l’avant-garde socialiste, PAGS, une formation affilée à la gauche arabe qui avait fait de la diversité culturelle un atavisme dont il affalait impérativement débarrasser la société marocaine quand elle n’était pas désignée comme le cheval de Troie de l’impérialo-sionisme. 

Depuis, l’irascible panarabiste a fait du chemin, jusqu’à devenir responsable du PAM, un parti qui revendique l’amazighité comme socle de l’identité marocaine. Pour autant, les observateurs s’accordent à dire que l’exubérance du ministre de la justice ne contredit pas la sincérité de son engagement en faveur des libertés individuelles et collectives. Il assume son opposition à la peine de mort et vient d’annoncer une reforme favorable aux peines alternatives. L’opposition entre les deux dirigeants qui porte sur des questions sociétales majeures est donc bien réelle.

Pourtant, les discussions dans les salons de Rabat bruissent de rumeurs qui assurent que ces altercations, pour bruyantes et colorées qu’elles soient, ne sont qu’un écran de fumée. Ce qui se jouerait en réalité c’est la primature car le sort de Aziz Akhanouch, l‘actuel chef de l’exécutif, serait d’ores et déjà scellé. Le premier ministre qui a essuyé un premier tir de barrage du PJD et du PPS avant de se voir contredit par le président de la banque centrale ( voir adn-med du 30/03/2023) est l’objet de contestation de plus en plus vives pour un bilan social et économique jugé peu reluisant. Les explications reliant l’inflation et les pénuries de plusieurs produits de large consommation aux tensions internationales par lesquelles il tente du justifier les difficultés qui impactent le quotidien d’un grand nombre de familles marocaines n’ont pas convaincu. 

Le Palais veut sécuriser le repositionnement du Royaume

Les contestations sociales qui se multiplient sont d’autant plus problématiques que des factions politiques islamistes et d’extrêmes gauche tentent d’y greffer des slogans plus ou moins explicitement hostiles aux orientation prises par le Maroc depuis qu’il a souscrit aux accords d’Abraham. Des remises en cause qui ont provoqué un clash entre Benkirane et Nacer Bourita, le ministre des affaires étrangères accusé de reniement de la cause palestinienne. Une intrusion dans le champ diplomatique jugée suffisamment grave pour avoir entrainé un recadrage du Palais ( voir adn-med du 21/03/2023 ). C’est dire à quel point tout ce qui peut prêter à tendre présentement le climat social et politique dans le royaume doit être évité. 

Comme c’est souvent le cas au Maroc, c’est par la bande que sont annoncées les prémices des bouleversements politiques et institutionnels. L’ancien président du PAM, Ilyas el Omari, un autre berbère du Rif, dont le bagou est tout aussi tonique que celui du ministre de la justice, qui a disparu de la scène politique depuis cinq ans pour s’occuper de ses affaires en Espagne vient de réapparaitre sans crier gare. Il a acheté la station Radio Cap basée à Tanger avec l’intention d’en réformer les programmes pour en faire un média d’influence émettant en daridja, amazighe et espagnol. L’objectif est d’accélérer l’installation une nouvelle direction à la tête du PAM, Ouahbi ayant accumulé trop de polémiques et de maladresses qui ont généré des tensions dans les couches populaires. Selon des sources bien informées, la nouvelle équipe dirigeante du PAM a pour mission de préparer la candidature à la primature de Fouad Ali Himma, lequel a fait ses études avec Mohamed VI au collège royal. Un choix qui devrait agréer au Palais dans une conjoncture de repositionnement géopolitique inédite du Royaume. 

Himma a fait un séjour de trois semaines aux USA pour des raisons de santé ; un sujet qui ne semble pas constituer un obstacle à une ambition qu’il a toujours rêvé d’assouvir.

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