Victoire de la droite en Grèce : quelles conséquences sur la Méditerranée ?
L’éclatante victoire du premier ministre sortant Mitsotakis va peser sur les rapports de force en Méditerranée occidentale dans une conjoncture marquée par l’invasion de l’Ukraine. Son parti Nouvelle droite qui obtient une majorité absolue, lui offre un nouveau mandat de quatre ans où il dispensé de toute alliance contraignante pour former son gouvernement.
Un pays silencieux qui pèse
Le gouvernement était pourtant confronté à une série de drames dont beaucoup d’observateurs pensaient qu’ils pouvaient impacter le scrutin du 25 juin. La collusion de deux trains qui a fait 57 morts à Larissa le 28 février avait alors permis à l’opposition de gauche et d’extrême droite de pointer du doigt la vétusté des infrastructures ferroviaires. Plus récemment, la disparition plusieurs centaines de migrants au large de la Grèce sans que les secours de ce pays ne soient intervenu avait soulevé un tollé d’indignation internationale. Autant d’évènements qui n’ont pas spécialement pesé sur le choix des électeurs.
Pour l’Europe occidentale, la stabilité de la Grèce est l’une des pièces maîtresses des enjeux qui se jouent en Méditerranée orientale. En effet, la remuante Turquie y teste régulièrement ses ambitions d’extension territoriale et maritime, et l’exploitation d’importants gisements de gaz en zone off shore qu’Athènes envisage d’entreprendre avec Israël et l’Egypte, avec la bénédiction de l’Arabie saoudite, représente un intérêt géo-énergétique encore plus décisif depuis que Poutine a ordonné l’invasion de l’Ukraine.
Plus au nord, l’influence de la Grèce sur des Balkans en perpétuelle effervescence est une donnée politique établie malgré la relative discrétion de l’expression diplomatique athénienne dans cette zone.
Zone de contact russo-ukrainienne
Enfin, dans ce pays où la religion orthodoxe est toujours prégnante, Athènes, clairement installé dans le bloc occidental, réussit cependant à garder des relations suffisamment équilibrées entre Moscou et Kiev. Une position qui peut en faire un acteur capable de jouer un rôle d’intercession à un moment ou un autre du conflit russo-ukrainien, la proximité d’Ankara avec Moscou ne favorisant pas un arbitrage crédible.
Nombre de Russes sont établis en Grèce et des citoyens ayant fui les rigueurs poutiniennes y vivent, attendant l’opportunité de peser sur le cours des choses. Ils rencontrent d’ailleurs des Ukrainiens avec lesquels les échanges restent possibles, même s’ils sont quelquefois tendus. « Les catégories des Russes installés en Grèce ne sont pas du même registre social et culturel que ceux qui sont à Doha où à Abou Dhabi », explique ce responsable de l’un des grands musées d’Athènes. « Ce sont généralement des cadres bien formés intellectuellement. Des enseignants, des journalistes, des artistes ou des fonctionnaires qui ont fui l’enfermement politique et qui se retrouvent souvent entre eux » souligne notre interlocuteur qui ajoute que « les ambassades suivent avec intérêt ces groupes qui peuvent s’agréger aux mouvements de contestation russes éparpillés dans le monde pour représenter une alternative à Poutine si l’occasion de son éviction se présentait. »
Pour ce cadre d’une section de quartier d’Athènes de Syriza, la formation de gauche qui s’est effondré dans cette élection avec 17% des suffrages, une des erreurs de son parti a été « de ne pas avoir prêté attention à ces exilés qui ont trouvé plus de soutien auprès de Nouvelle droite. » Selon lui, cette indifférence a été vécue par certains responsables de Syriza comme une démission devant les enjeux géopolitiques qui secouent l’Europe centrale. « Une forme de renoncement à la responsabilité géopolitique qui limite et trouble les visions d’un parti qui a gouverné le pays il n’y a pas si longtemps. Et cela a pesé sur l’enthousiasme des militants. », déplore le cadre local.
L’invasion de l’Ukraine impacte tous les pays. En Grèce, la crédibilité politique est en faveur de la droite.