Algérie-Maroc : mano a mano diplomatique
Ahmed Attaf, le ministre des affaires étrangères algérien a à peine quitté Berlin où il a achevé son périple européen que son homologue marocain, Nasser Bourita y est arrivé. Pour l’Afrique du nord, l’Allemagne est un pays stratégique. Pays européen à la puissance économique établie, la rive sud de la Méditerranée occidentale y trouve un marché aux produits fiables et qui, élément non négligeable, n’est pas pollué par les tensions mémorielles qui perturbent les relations contractuelles avec la France.
Lors de sa visite allemande, Attaf a mis en avant les infrastructures existantes en Algérie pour leur intégration dans l’initiative Sout H2 destiné au transport de l’hydrogène et sur lequel se sont déjà engagées des sociétés allemandes, autrichiennes et italiennes. C’est un projet de 3300 km avec une capacité de couverture de 10% des besoins énergétiques européens. Ce tracé devrait partir d’Algérie pour atteindre l’Italie via la Tunisie. Bémol, le parcours ne concerne pas la péninsule ibérique et la France, une donnée sur laquelle table le Maroc.
D’autant que sur le dossier hydrogène Rabat qui ambitionne d’être le leader africain s’est déjà positionné depuis longtemps. Etudes, projets de partenariat n’ont pas manqué.
Comme pour l’acheminement du gaz nigérian vers l’Europe sur lequel se disputent les deux pays, la compétition entre l’Algérie et le Maroc est aussi féroce pour l’approvisionnement de l’Europe en hydrogène vert.
Le potentiel énergétique de l’Algérie lui donne un incontestable avantage. Mais la donne politique plaide pour le Maroc. Après le fiasco de l’investissement allemand dans l’approvisionnement en gaz russe, les considérations géopolitiques reviennent au premier rang des stratégies économiques. Le Maroc, allié historique de l’occident et qui vient de confirmer son engagement avec la signature des accords d’Abraham, se présente comme un partenaire stable et fiable pour l’Union européenne.
Si le ministre des affaires étrangères algérien a aussi rencontré Robert Habeck, vice chancelier, ministre de l’économie et du climat, son conversation avec son homologue Annalena Baerbock fut plutôt fraiche. L’alignement d’Alger sur Moscou dans le dossier ukrainien et les atteintes récurrentes aux libertés furent adroitement mais clairement rappelés au chef de la diplomatie algérienne.
Quelques jours plus tard le communiqué signé entre cette même ministre et Nasser Bourrita fut autrement plus conciliant, y compris sur le très épineux dossier du Sahara occidental dont Berlin est plutôt favorable à la position marocaine.
Dans cette compétition où le Maroc et l’Algérie se disputent les faveurs de l’Europe, le point est au royaume chérifien et ceci, malgré l’affaire Pegasus et le Marocgate, où des diplomates marocains sont soupçonnés d’avoir corrompu des élus e l’UE.
En Europe, l’invasion de l’Ukraine a bel et bien bouleversé la donne géopolitique.