Algérie. Condamnations, acquittements et réductions de peines juridiquement illisibles
La chambre criminelle de deuxième instance près de la Cour d’Alger a rendu son verdict dans la nuit du dimanche à lundi dans le procès en appel de plusieurs détenus d’opinion poursuivis pour divers chefs d’inculpation, y compris certains relevant du controversé article 87 bis du code pénal qui criminalise l’action politique. Des décisions juridiquement illisibles.
Cafouillage à Alger
Parmi les verdicts prononcés, on note la réduction de peine pour Belaid Amar Khodja et Bouaziz Ait Chebib. Belaid Amar Khodja a été condamné à trois ans de prison ferme assortis d’une amende de 50 000 dinars, tandis que Bouaziz Ait Chebib a écopé de deux ans de prison, dont une année avec sursis, et d’une amende de 50 000 dinars. Les deux accusés devront également verser solidairement une somme de 100 000 dinars au trésor public à titre de dédommagement.
En revanche, Hamou Boumedine, Boussad Becha et Houcine Azzam ont bénéficié de la confirmation de leur acquittement.
Le procès en appel s’est ouvert le 9 juillet 2023 devant la chambre criminelle de deuxième instance près de la Cour d’Alger. Le procureur avait requis des peines sévères, demandant notamment trois ans de prison pour Bouaziz Ait Chebib, cinq ans de réclusion criminelle pour Hamou Boumedine, dix ans de prison pour Houcine Azzam et Boussad Becha, et enfin vingt ans de réclusion pour Belaid Amar Khodja.
Il convient de rappeler les verdicts rendus lors du procès en première instance. Hamou Boumedine, Boussad Becha et Houcine Azzam ont été relaxés de toutes les charges qui pesaient contre eux, tandis que Bouaziz Ait Chebib a été condamné à deux ans de prison ferme et à une amende de 100 000 dinars. Belaid Amar Khodja a quant à lui écopé de quatre ans de prison ferme et d’une amende de 50 000 dinars.
Aucune explication n’a été avancée pour justifier les distorsions qui ont catactérisé ces peines et les annulations de certaines d’entre elles.
Tribunal criminel de Dar El Beidha
Dans un autre volet, le tribunal criminel de Dar El Beidha a rendu son verdict hier en fin de journée. Kamira Nait Sid, Ahmed Saïd Farid et Bouaziz Ait Chebib ont été acquittés de toutes les charges retenues contre eux. Ahmed Saïd Farid a été libéré, tandis que Kamira Nait Sid et Bouaziz Ait Chebib sont toujours détenus pour d’autres affaires. Hamzi Lounis a quant à lui été condamné à trois ans de prison ferme, avec une libération prévue le 7 octobre 2023. Smail Mendes, qui était en état de liberté, a également bénéficié de la confirmation de son acquittement.
Les accusations portées contre ces personnes concernaient une supposée appartenance au Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie, ce qui n’était le cas pour aucun d’eux. Quelques uns n’ont jamais adhéré aux thèses de cette mouvance, d’autres l’ont quitté depuis plusieurs années après les radicalités de son discours.
IL faut relever que le Mak comme le mouvement islamiste Rachad, deux groupes peu présents sur le terrain, représentent désormais les deux alibis qui servent au pouvoir algérien à musèler toute expression de l’opposition.
Tribunal de Batna
Quatre cents kilomètres plus à l’est, Sami Dernouni, un détenu d’opinion, a été condamné à une année de prison ferme et à une amende de 100 000 dinars sans que le concerné ne connaisse les véritables raisons des décisions qui l’ont sanctionné.
Ces différents verdicts illustrent le fonctionnement pendulaire d’une justice instrumentalisée à la faveur de conjonctures troublées par des contestations populaires ou des rapports de force claniques. En effet, de lourdes condsamnations prononcées dans un climat de tensions sociales ou plitiques sont transformées en acquittements lorsque le pouvoir doit, pour des considérations internes ou externes, donner des signes d’apaisement.
Données remarquable de la justice algérienne, les détenus acquittés, dont certains ont passé plusieurs années de prison, ne bénéficient d’aucune indemnisation.