jeudi, novembre 30, 2023
Politique

Algérie. Le rapporteur de l’ONU plaide pour le respect des lois et du droit international

Clément Nyaletsossi Voule, rapporteur spécial des Nations unies sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association, est un expert indépendant de l’ONU. Il vient de rendre publiques ce mardi ses premières conclusions – dont le lecteur trouvera ci-après l’intégralité – lors d’une conférence de presse donnée à la Maison des Nations unies et où il a exprimé sa préoccupation concernant les restrictions légales actuelles et les poursuites judiciaires lancées contre des individus, des associations, des syndicats ou des partis politiques en Algérie. Il s’agit là d’une première évaluation en attendant la publication d’un rapport exhaustif prévu pour juin 2024.

Tout en se félicitant de la coopération des autorités, le rapporteur a néanmoins noté un décalage entre les proclamations officielles d’une part et la dégradation des libertés individuelles et collectives constatée sur le terrain d’autre part.

Plusieurs remarques reviennent dans la déclaration liminaire de neuf pages remise à la presse. Le retard injustifié pris pour mettre en conformité le droit de réunion et d’association avec la Constitution de 2020 ; le recours à des lois anciennes, dont certaines sont en contradiction avec la Constitution, pour empêcher le citoyen de faire valoir ses droits ; la non-conformité de textes de loi avec des dispositions du droit international ratifiées par l’Algérie sont autant de préoccupations relevées par l’expert. En outre, le caractère vague et imprécis qui a présidé à la rédaction de certaines lois fait que leur interprétation abusive se fait au détriment de l’effectivité du droit. Enfin, des sanctions prises par des instances extrajudiciaires et, quelquefois, à l’insu des concernés ont été déplorées.

Ces inquiétudes ont été relevées au cours d’une mission officielle qui a duré 10 jours et pendant laquelle l’expert a rencontré des membres du gouvernement, des parlementaires, des avocats, des militants politiques et des acteurs de la société civile d’Alger, d’Oran et de Béjaïa où il s’était rendu. 

En revanche, le rapporteur qui s’est souvent référé à la Constitution a omis de pointer les différenciations faites par la loi fondamentale algérienne entre les cultes, qui distingue explicitement la religion musulmane des autres croyances. Par ailleurs, le droit au blasphème considéré comme un droit citoyen dans plusieurs nations et qui est sanctionné dans la Constitution algérienne n’a pas soulevé de commentaires de la part de monsieur Nyaletsossi. Les observateurs ont, en effet, constaté ces dernières années une certaine propension des Nations unies à accompagner les orientations conservatrices de certains pouvoirs. L’ONU a notamment condamné la France qui a décidé d’interdire le port de l’abaya dans ses écoles.

En résumé, le rapporteur de l’ONU qui s’est astreint à un style pondéré dans sa formulation a néanmoins souligné une sérieuse restriction des libertés depuis 2020.  Ce qui le conduit à inviter le gouvernement algérien à adapter son arsenal législatif à la nouvelle Constitution et à honorer ses engagements en matière de respect du droit international qui s’impose à la loi nationale, surtout quand il en a ratifié les recommandations. Enfin, l’expert déplore des applications aléatoires des lois ayant permis d’emprisonner des dizaines, voire des centaines, de citoyens qui ont exprimé leur désaveu pendant les manifestations du Hirak et dont monsieur Nyaletsossi demande la libération.  

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