Israël-Hamas : Erdoğan estime que HAMAS n’est pas une organisation terroriste
Le président turc, Recep Tayyip Erdoğan, a annoncé ce mercredi l’annulation de tous ses projets de déplacement prévus en Israël. Cette décision marque un revirement significatif après sa rencontre avec le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou en septembre dernier à New York et le net réchauffement obervé depuis entre les deux pays.
Indignation tardive et peu crédible
« J’ai serré la main de cet homme, nous avions de bonnes intentions. Mais il nous a abusés », a déclaré Erdoğan devant le Parlement, suscitant des réactions enflammées parmi les députés scandant « À bas Israël » et « Allah Akbar ! ». Il a exprimé son indignation face à ce qu’il qualifie d’inhumanité dans les actions de l’armée israélienne, pointant du doigt les bombardements à Gaza en représailles à l’attaque du Hamas le 7 octobre dernier, qui a causé, selon les Israéliens, la perte de 1400 vies. Venant d’un homme qui soutient les opérations de déplacements massifs des populations arméniennes et ordonne des frappes aériennes indifférenciées au Kurdistan, ses dénonciations des violences infligées à Gaza manquent de crédit. Mais celui qui rêve de reconstituer l’empire ottoman ne pouvait rester trop longtemps à l’écart de la mobilisation qui enflamme la rue dans le monde musulman.
Le chef de l’État turc a également remis en question la classification du Hamas en tant qu’organisation terroriste, affirmant qu’il s’agissait d’un « groupe de libérateurs qui protègent leur terre ». Il a vivement critiqué les puissances occidentales, les accusant de verser des larmes pour Israël sans prendre de mesures concrètes pour mettre fin aux hostilités. Pourtant, au lendemain de l’attaque du Hamas , Erdogan avait exigé de son leader, Ismaël Hanieh, de quitter la Turquie après que ce dernier s’est filmé en train de prier avec son staff devant les images du massacre commis par ses hommes en Israël.
Chevaucher la question palestinienne
Passé maître de l’exploitation des opportunités d’aubaine pour se poser en arbitre intéressé, Erdoğan a souligné le contraste entre la mobilisation internationale pour l’Ukraine et le silence concernant les événements à Gaza, qualifiant cela d’hypocrisie flagrante. Il a appelé à la création d’une « Palestine indépendante » et a proposé la tenue d’une conférence entre Israël et les Palestiniens, avec la Turquie en tant que garant d’un éventuel accord futur.
Mardi soir, le président Erdoğan a vivement critiqué le Conseil de sécurité des Nations unies pour son rôle dans la crise à Gaza, l’accusant d’aggraver la situation et de porter préjudice à la réputation de l’ONU. Il a souligné l’incapacité du Conseil à instaurer un cessez-le-feu rapide et à prendre des mesures pour éviter les pertes civiles.
Après avoir appelé à la retenue suite à l’attaque perpétrée par le Hamas et la réponse israélienne, Erdoğan a qualifié de « génocide » la frappe sur un hôpital de Gaza la semaine dernière, l’attribuant immédiatement à Israël, bien que sachant que des informations ultérieures avaient exonéré Tsahal de ce drame.
L’Iran, allié et rival
À la tête d’un pays majoritairement musulman et engagé en faveur de la cause palestinienne, Erdoğan prévoit de participer samedi à un rassemblement organisé par son parti, l’AKP, proche des Frères musulmans dont relève Hamas, en soutien à la cause palestinienne.
Depuis l’arrivée d’Erdoğan à la tête de la Turquie, ce pays toujours membre de l’OTAN, qui faisait jadis le pont entre deux continents semble progressivement renoncer à son ancrage européen. Son attention se tourne de plus en plus vers le Moyen-Orient et le Caucase. Selon les observateurs, le chef d’État turc qui s’emploie à asseoir son emprise sur le monde turcophone cherche à s’imposer comme le rassembleur des sunnites pour faire pièce à l’Iran – par ailleurs son allié avec la Russie et la Chine dans le regroupement anti-occidental qui se met en place à la faveur de l’invasion de l’Ukraine – qui ne cache plus sa prétention de se projeter, via le Hizbollah, Hamas et les Huttis yéménites, comme le leader du monde islamiste.
SAIDANI Kassi